Loi ORE, début d’une longue série de destruction

par | Avr 14, 2018 | Luttes | 0 commentaires

« Nous ferons en sorte que l’on arrête de faire croire à tout le monde que l’université est la solution pour tout le monde. »

Emmanuel Macron, Le Point, 31 août 2017.

Avec l’agression du 22 mars d’étudiants grévistes par des milices d’extrême droite à Montpellier, le mouvement étudiant contre la sélection à l’université, contre la loi dite d’orientation et de réussites des étudiants, prend de l’ampleur dans les différentes facs avec plusieurs blocages importants comme au Mirail à Toulouse ou à Tolbiac à Paris. Quels sont les tenants et les aboutissants de la Loi ?

La loi ORE a été présentée au Conseil des ministres le 22 novembre 2017 et adoptée le 15 février dernier et inspirée par le Plan étudiant annoncé en octobre 2017, censé accompagner les étudiants vers la réussite. Nous y reviendrons, mais elle trouve aussi sa source dans une note de l’économiste Robert Gary-Bobo (voir plus bas).

Qu’est-ce qu’on y trouve ? Eh bien, pour les lycéens, est remplacée la déficiente Admission Post Bac par l’algorithme Parcoursup, afin de mettre fin au tirage au sort alors que celui-ci n’a concerné que 0,9 % des lycéens concernés. Le jeune, cet être insondable, dont visiblement le pouvoir macronien pense qu’il doit être dressé, docile et prêt à travailler (comprendre : se faire exploiter), doit faire un maximum de 10 vœux non classés et motivés. Ce qui, au moment où la plate-forme se met en place, provoque le stress de nombreuses familles face aux nombreuses démarches administratives (1).

Un élève qui souhaite entrer à l’université devra dès la seconde connaître sa filière et les attendus demandés, auquel cas il ne sera pas pris, ou alors après s’être conformé avec une année de césure.  Ceux qui sont passés par le lycée savent que jeune, on a rarement une idée claire de ce que l’on veut faire, et c’est normal, on a rarement le temps de se renseigner efficacement sur une filière et sur tout ce qui nous est demandé. Alors pourquoi ? Le but, c’est que l’élève n’ait pas de rêve, mais seulement un plan de carrière, qu’il soit adaptable aux désirs du capital. La réussite, ça se prépare, sinon on court vers l’échec, vers la rue, vers Pôle emploi, vers les riens qui affluent dans les gares (2).  

Après, nous avons les fameuses « Fiches avenir », remplies par les professeurs et les chefs d’établissement et donnant un avis sur les vœux inscrits des étudiants. Avis notons-le qui n’aura pas la même valeur en fonction des lycées, des plus réputés aux plus mal famés. Car ne l’oublions pas, la loi est accompagnée de la casse du bac, qui tend à n’être qu’un diplôme non plus national, mais seulement valant par rapport à son établissement. 

Mais cela prend en compte les compétences de l’étudiant, non ? C’est ce qu’on entend chez certains des étudiants. L’école n’est pas là pour privilégier les soi-disant « compétences » (valorisables sur un CV), mais pour transmettre des connaissances de manière active autant que possible avec esprit critique, car le but de l’éducation nationale, c’est la formation de l’homme, du citoyen et du travailleur. Dire le contraire, c’est faire un pas vers la mise au pas de l’école par le patronat.

Autre conséquence de la loi, c’est l’énorme gâchis de temps pour les enseignants et le personnel administratif de l’université qui, au lieu de faire  humblement son travail, va devoir trier des tonnes de dossiers envoyés par Parcoursup. Il est vrai, compensé par un investissement du gouvernement pour pouvoir créer de nouvelles places, mais est-ce que cela va suffire, c’est la question…

Nous ne pouvons que saluer par contre la loi en ce qu’elle fait passer tous les étudiants sous le régime normal de la sécurité sociale et met fin à ces régimes particuliers honteusement compliqués.

Le résultat n’est donc pas positif, toutefois nous sommes malheureusement obligés de vous dire qu’il ne s’agit que d’un début. À ce titre, les opposants à la loi qui crient à la destruction de l’université devraient se calmer, ce qui arrive derrière étant pire. Ce qui arrive, c’est la fin du modèle égalitaire de l’université.

En effet, nous avions pu critiquer il y a quelques mois un document de 10 pages écrit pour le programme présidentiel de Jupiter 1er sur les réformes universitaires, écrit par un certain Robert Gary-Bobo, économiste. Ce qui est dans la loi ORE en provient en partie, seulement ce n’est quasiment qu’un accessoire pour une politique de plus grande échelle où l’on trouve notamment :

  • Des frais d’inscriptions à 1000 euros l’entrée (moyennant un prêt à la banque).
  • Des diplômes à la carte, les licences étant transformées en Bachelor, ce qui signifie que le diplôme n’est plus national, mais n’a qu’une valeur par rapport à l’université.
  • Imposition du modèle des grandes écoles aux universités publiques qui doivent être compétitives.

En conclusion, nous invitons tout le monde, les étudiants, les lycéens, les syndicalistes et les citoyens à lire cette prose macroniste afin de comprendre ce qui va nous arriver et COMMENT ça va nous arriver.

En attendant les Jeunes pour la renaissance communistes en France continuent leurs combats pour une éducation de qualité, une université égalitaire et permettant le développement de l’être humain.

  1. « Les étudiants livrés au marché de l’anxiété » d’Annabelle Allouch, Le monde diplomatique n°769, avril 2018.
  2. Ibid. « Un marché ad hoc est déjà apparu pour aider les familles à atténuer ce sentiment désagréable. Moyennant 560 euros, la société Tonavenir.net propose une « formule sérénité », qui comprend des conseils d’orientation, une aide à l’écriture des lettres de motivation, et même la gestion du départ des vœux sur la plate-forme… »

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