« Qui publiquement fait la propagande pour un système fasciste ou autre totalitaire et appelle à la haine du fait de différences nationales, ethniques, raciales ou liées à la religion sera puni d’une amende, de limitation ou de privation de liberté jusqu’à deux ans. »
Article 256 du Code pénal polonais.
C’est sur la base de cet article que la justice polonaise a jugé nos camarades du Parti communiste de Pologne, amalgamant une fois de plus le fascisme et le communisme !
En effet, 4 camarades du KPP ont été poursuivis pour la publication d’un article de la jeune Beata Karon dans le journal de leur organisation, l’Aurore, et pour sa publication sur leur site internet. Cet article, disponible en français, n’a rien de choquant : il n’est ni raciste, ni sexiste, n’appelle pas au terrorisme, ni même à la révolution, il ne fait que rappeler certains bienfaits de la Pologne communiste (sur le plan économique). Mais visiblement c’en est déjà trop pour l’accusation qui considère que l’article fait la promotion de valeurs contraires à la démocratie. Ce procès fut une farce, car les juges ont agi selon une procédure spéciale qui permet de statuer sur certains délits, quand « la culpabilité de l’accusé ne fait pas de doute », sans permettre un véritable droit de la défense à l’accusation, ce qui est contraire aux principes essentiels de la démocratie bourgeoise ! Résultat : certains camarades ont été condamnés à de la prison, et tout ça pour avoir poursuivi leur activité statutaire !
Et de l’autre côté, les fascistes ne sont pas inquiétés : ils peuvent, comme le Rassemblement national radical manifesté à Bialystok en 2016 pour les 82 ans de leur fondation, porter des étendards avec les symboles de la phalange et appeler à liquider leurs ennemis politiques sans être inquiétés ! Un tribunal peut relaxer un homme faisant commerce de tee-shirts racistes ! Le ministère de la défense peut programmer d’armer les fascistes en les intégrant à la nouvelle structure de défense du territoire : cela ne choque personne ! Le ministère de la justice peut suspendre l’exécution du jugement d’un nationaliste condamné pour agression sur un policier, là encore l’article 256 n’est pas appliqué ! 60000 fascistes polonais peuvent défiler le 11 novembre dernier en appelant à un nouvel holocauste et à une Europe blanche, mais là encore, aucune poursuite.
L’article 256 ne servirait-il pas seulement à condamner les communistes ? La réponse est Oui.
Ce fascisme très influencé par l’Église catholique peut faire ce qu’il veut en toute impunité. Les communistes écrivent un article à caractère scientifique et c’est la prison qui les attend.
Il faut dire qu’avec l’arrivée au gouvernement du parti (mal nommé) « Droit et Justice » ils se sentent pousser des ailes ! Celui-ci n’a de cesse de mener à terme sa politique de « décommunisation » totale de la Pologne avec l’aide de l’Institut de mémoire nationale* : noms des rues qui doivent être changés (comme le rond-point Edward Gierek à Sosnowiec en Haute-Silésie), les monuments en hommage aux combattants de l’armée rouge et aux Polonais engagés dans les Brigades rouges, et même son intention de détruire la forêt de Bialowieza, plus vieille forêt d’Europe et qui fut protégée sous la période socialiste. Bien sûr, cela rencontre une résistance de la part de populations qui sont loin d’être toutes communistes !
Heureusement, certaines « bonnes âmes » bourgeoises se sont réveillées et ont protesté quand elles ont entendu parler du projet du PiS de réformer la justice pour que celle-ci soit sous tutelle de l’exécutif. Ce qui voudrait dire deux choses : 1) la violation du principe constitutionnel commun à toute démocratie bourgeoise de la séparation du pouvoir, 2) la mise en place d’une dictature, car toute dictature commence par mettre la justice au pas !
Et vous savez quoi ? Les plus zélés partisans de la réforme invoquent la nécessité de la réforme pour abattre la caste judiciaire composée d’anciens membres de l’élite communiste…
Dénonçons l’hypocrisie de l’Union Européenne sur ce sujet. Elle a activé l’article 7 du Traité sur l’Union européenne (qui permet d’exclure un membre qui contreviendrait à des principes essentiels de l’Union, comme la démocratie), mais en disant qu’au bout de trois mois, si la Pologne se tient bien, elle sera prête à réviser sa position. Première hypocrisie, pour des défenseurs acharnés de la démocratie, on peut les trouver bien tendres. Pas de sanction économique, pas de menace permanente de la Commission envers le Pouvoir polonais. On se prend à refuser que du jour au lendemain le PiS annonce son intention de ne pas payer sa dette et de ne pas respecter les règles budgétaires de Bruxelles. On verrait sans doute nos défenseurs aussi acharnés qu’ils l’ont été avec la Grèce. Deuxième hypocrisie, pour accueillir les sanctions définitives contre la Pologne (son exclusion), il faut l’unanimité des États-membres. La Hongrie, elle aussi soumise à une procédure par l’article 7, n’est pas interdite de vote dans l’affaire concernant la Pologne, ce qui lui permettra d’empêcher les sanctions. Et qui donc pense réellement qu’un partenaire économique de la Pologne comme l’Allemagne votera l’exclusion ?
Rappelons qu’en Pologne actuellement, depuis la chute du communisme, une partie de sa main d’œuvre s’est expatriée, beaucoup de jeunes voyant leurs conditions précaires songent à s’expatrier, que son économie a été grandement affectée voire détruite par les privatisations (rappelées justement par Beata Karon dans l’article incriminé), dont la plupart de l’industrie et du capital financier est contrôlée par le capital international, qu’elle est le terrain de jeu de l’impérialisme américain dans sa guerre contre la Russie (les nombreux entrainements de l’OTAN en sont la démonstration) et que les pouvoirs successifs ont interdit (ou tentent de le faire) dans tous les cas de figure le droit à l’avortement, précarisant ainsi de nombreuses femmes qui y ont recours.
Le 27 septembre, nous organisons une manifestation devant l’ambassade de Pologne à Paris pour demander la relaxe de nos camarades polonais. C’est par devoir internationaliste que nous faisons ça. C’est aussi parce que nous n’aimons guère les fascistes en France que nous les détestons chez les autres.
Tous ensemble contre la répression anticommuniste en Pologne et contre le fascisme !
27 janvier à 14 h 30
1 Rue de Talleyrand, 75007 Paris, France
Ambroise-RCF
Rajouts :
-Au départ, il y avait seulement trois accusés, mais maintenant, il n’y en a plus que deux, l’un des accusés étant décédé depuis.
-Le procès des camarades se déroulera le 1er février.
* Imaginée en 1997 par la droite dans le cadre de la purge de ceux qui avaient eu des responsabilités sous le communisme, cette institution fait des recommandations sur les monuments qui doivent être supprimés et sur les rues qui doivent être débaptisées. Elle dispose d’un pouvoir et d’un budget importants et elle travaille directement sous les ordres du président et du premier ministre polonais.
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