Il y a presque un an, Evo Morales était réélu président de la République de Bolivie avec 47 % des voix avant de devoir démissionner, comme la plupart des membres de son gouvernement, en faisant face aux pressions et à des menaces de mort. À posteriori, le 4 décembre 2019, un rapport de l’Organisation des États américains venait invalider les résultats de cette élection générale en invoquant de « profondes irrégularités » (1). Toute cette situation s’est révélée être en réalité un coup d’État, organisé de concert par l’opposition intérieure et extérieure à la Bolivie.
Près d’un an après le coup d’État contre le gouvernement d’Evo Morales en Bolivie, le MAS (Movimiento al Socialismo, « Mouvement vers le Socialisme ») a gagné les élections générales tenues le 19 octobre 2020 grâce à un fort soutien populaire. Ainsi, Luis Arce, ancien ministre de l’économie du gouvernement d’Evo Morales, est devenu président de la Bolivie. Si les médias dominants en France et ailleurs ont commenté cette bonne nouvelle, ils ont aussi entretenu la confusion, voire pire, durant cette dernière année. Comme par exemple, l’article de France Info parlant de « milliers de Boliviens célébrant le départ d’Evo Morales » en novembre 2019 (2), ce qui, comme on le voit maintenant, s’appelle de la manipulation médiatique. France Info en profite également pour mettre entre guillemets les déclarations de Morales sur ce qui est réellement un coup d’État après l’arrivée au pouvoir de Jeanine Áñez, laquelle a fait appel à l’armée et à la police en vue d’obtenir un « climat » de paix sociale. Rappelons que l’une des premières actions de l’autoproclamée présidente de la droite catholique Jeanine Áñez a été de reconnaître Juan Guaído, son sinistre homologue autoproclamé président du Venezuela reconnu par ailleurs comme tel par une cinquantaine de pays tous atlantistes, soit une minorité de pays dans le monde. De son côté, le journal Le Monde a publié un éditorial assassin (3) contre Evo Morales le 14 novembre 2019, parlant de sa « tentation autoritaire », défendant au passage Carlos Mesa, comme l’on peut s’y attendre, le candidat centriste face à l’extrême-droite… C’est finalement l’autoproclamée Jeanine Áñez, elle bien autoritaire, qui a installé la terreur dans toute la Bolivie, sous couvert, comme d’habitude, de discours évoquant la « démocratie » et la « paix sociale », tout en réintroduisant les références religieuses au sein de l’État alors qu’elles avaient été officiellement exclues par le MAS et en massacrant manu militari ses opposants, comme ce fut le cas à Sentaka et à Sacaba.
Il est désormais reconnu que les accusations trouvées dans le rapport de l’Organisation des États américains (OEA) publié le 11 novembre 2019 à l’encontre d’Evo Morales étaient fausses. Plusieurs contre-expertises latino-américaines et états-uniennes ont invalidé une à une les accusations de l’OEA à l’encontre du gouvernement sortant d’Evo Morales, notamment celle du décompte des voix lors de l’élection de 2019 (4). Inlassablement, les mêmes méthodes d’ingérence et de déstabilisation sont menées par les puissances impérialistes états-uniennes depuis des années contre ceux qu’elles considèrent comme étant des marchés à exploiter, comme des pays dont les ressources sont à utiliser pour le seul profit, peu importe les peuples qui y vivent. En Bolivie, les ressources principales qui attisent toutes les convoitises impérialistes, en particulier états-uniennes, sont l’étain, l’or et le lithium, selon Bartolina Sisa, la dirigeante du Mouvement de femmes indigènes et paysannes (5). Bartolina Sisa rappelle que, durant toute cette dernière année, ce fut une femme, Jeanine Ánez, qui a été à la tête de l’organisation des massacres d’autres femmes et hommes de la classe populaire et paysanne. Certes, Jeanine Ánez n’était certainement pas seule, mais cela en dit effectivement très long sur la conscience de classe dont nous sommes malheureusement loin – actuellement – en France et ailleurs dans nos pays prétendument « avancés ». Cela explique en partie les sottises, pour ne pas dire plus, que nous pouvons entendre quotidiennement, notamment sur les sujets liés au féminisme sans aucune dimension de classe, sans aucun aspect économique ou social.
Ce juste retour des choses, c’est-à-dire la réélection d’un allié d’Evo Morales à la tête de la Bolivie, Luis Arce, est fortement encourageant pour les pays latino-américains et pour le socialisme. Une grande majorité de Boliviens ont en effet contré toutes les attaques par leur choix de continuer sur la ligne tracée par le MAS depuis près de 15 ans et qui a permis de financer des mesures sociales essentielles pour tous les Boliviens, notamment grâce à la nationalisation des hydrocarbures et à la renégociation de tous les contrats avec les entreprises étrangères dès 2006. Par la suite, de grands investissements ont été faits dans le secteur public, ce qui a permis d’atteindre une stabilité économique qu’aucun pays de la région ne connaissait alors. Même le FMI et la Banque mondiale ont reconnu ces faits comme résultant de la politique économique et sociale menée par le MAS. C’est cette politique économique et sociale que les opposants de ces dernières années, tels que Jeanine Áñez et ses alliés intérieurs et extérieurs, ont tenté de détruire en instaurant l’incertitude, le racisme, la terreur et la division dans toute la Bolivie. Restons vigilants quant aux événements à venir et souhaitons que ces opposants criminels soient jugés comme il se doit afin que les peuples de Bolivie puissent exercer leur souveraineté et continuer leur chemin vers le socialisme.
Christophe-JRCF
Sources :
1. OAS. Final Report of the Audit of the Elections in Bolivia: Intentional Manipulation and Serious Irregularities Made it Impossible to Validate the Results. OAS – Organization of American States [en ligne]. 1 août 2009. [Consulté le 22 octobre 2020]. Disponible à l’adresse : https://www.oas.org/en/media_center/press_release.asp?sCodigo=E-109/19
2. Bolivie : la sénatrice Jeanine Añez devient présidente par intérim, Evo Morales dénonce un « coup d’Etat ». Franceinfo [en ligne]. 13 novembre 2019. [Consulté le 21 octobre 2020]. Disponible à l’adresse : https://www.francetvinfo.fr/monde/ameriques/bolivie-la-senatrice-jeanine-anez-presidente-par-interim-evo-morales-denonce-un-coup-d-etat_3700555.html
3. Bolivie : les erreurs d’Evo Morales. Le Monde.fr [en ligne]. 14 novembre 2019. [Consulté le 21 octobre 2020]. Disponible à l’adresse : https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/11/14/bolivie-les-erreurs-d-evo-morales_6019123_3232.htmlEditorial. Alors que sous sa présidence la pauvreté a été divisée par deux dans le pays, les inégalités ont reculé, le PIB a connu une hausse constante, M. Morales n’a pas résisté à la tentation autoritaire.
4. Bolivie : retour sur un putsch | Le Média. [en ligne]. [Consulté le 21 octobre 2020]. Disponible à l’adresse : https://www.lemediatv.fr/articles/2020/bolivie-retour-sur-un-putsch-uKOZhoppQ7ydHATA7Xo7yAActeur-clé de la chute d’Evo Morales, l’OEA voit ses preuves de fraude électorale tour à tour démontées. Depuis plus de huit mois, un pouvoir putschiste et autoritaire prospère en Bolivie sur les bases d’une étrange manipulation.
5. LIBRAIRIE-TROPIQUES.OVER-BLOG.COM. Pendant ce temps là… en Bolivie. … [en ligne]. [Consulté le 21 octobre 2020]. Disponible à l’adresse : http://www.librairie-tropiques.fr/2020/10/pendant-ce-temps-la.en-bolivie.html
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