Traduction : Antonio Bermudez
Ce communiqué de la direction du PC Britannique nous permet, à nous français, de comprendre les enjeux de classe liés à une éventuelle sortie de l’Union Européenne de notre pays, en affirmant la nécessité du caractère progressiste du Frexit que nous appelons de nos vœux.
Face aux droitiers rabattant sur l’UPR d’une part et aux gauchistes prétendant manier les contradictions principales et secondaires de l’autre (comme s’il pouvait, à l’époque impérialiste, y avoir une autre contradiction principale que celle entre le capital et le travail), l’exemple britannique démontre une fois de plus la justesse des analyses du PRCF. Sans Frexit progressiste, aucune souveraineté populaire n’est possible.
Le secrétaire général du Parti communiste britannique, Robert Griffiths, et son secrétaire international John Foster, ont publié le 26 décembre la déclaration suivante sur l’accord Royaume-Uni-UE sur le commerce et la coopération :
L’accord commercial Royaume-Uni-UE est un compromis entre les intérêts du capitalisme monopoliste d’État britannique d’une part et ceux du capital monopoliste allemand et français – représenté par leurs États et l’UE – de l’autre.
Le Parti communiste a constamment souligné que les grands capitalistes monopolistes de la Grande-Bretagne et de l’UE ont suffisamment d’intérêts en commun pour parvenir à un accord, aussi improbable soit-il à un moment donné. Mais un tel accord n’a jamais été prévu par aucune des parties pour être en faveur des classes ouvrières et des peuples d’Angleterre, d’Écosse, du Pays de Galles ou des autres pays d’Europe.
Ce nouvel accord libère la Grande-Bretagne de la souveraineté de l’UE mais pas de la souveraineté des grandes entreprises, qu’elles soient britanniques, européennes ou américaines. Il cherche à maintenir la domination des règles et politiques capitalistes du libre marché au sein du marché unique européen, appliquées par le droit britannique, les règles de l’Organisation mondiale du commerce et les nouveaux mécanismes d’arbitrage Royaume-Uni-UE.
En vertu du nouvel accord (titre IV), les capitaux resteront libres de cesser leurs activités et d’investir partout en Grande-Bretagne et en Europe, indépendamment des pertes d’emplois, des inégalités régionales et des exigences d’un développement économique et social équilibré. Cependant, les droits d’accès de la ville de Londres à l’Eurobond et aux autres marchés financiers de l’UE doivent encore être négociés en détail (titre II).
Surtout, dans le cas des marchés publics et de la mise en concurrence obligatoire, l’accord (titre VI) ratifie le plein fonctionnement de l’accord de l’OMC sur les marchés publics pour les services publics. Cela signifie les ouvrir à la pleine concurrence, l’UE et le Royaume-Uni acceptant d’étendre mutuellement ces réglementations à la distribution de gaz et de chaleur, aux services publics aux personnes, aux télécommunications, à l’éducation et aux «autres secteurs commerciaux» en Grande-Bretagne et en Europe.
Concernant les «règles du jeu équitables» du libre marché capitaliste et du droit de la concurrence, l’accord (Titre XI) engage les deux parties à maintenir «les normes élevées actuelles», y compris l’application de la loi sous leur propre souveraineté et par le biais de leurs propres tribunaux respectifs – avec les recours auprès OMC et procédures de règlement mutuellement convenues entre la Grande-Bretagne et l’UE.
Dans le même temps, le nouvel accord améliore les conditions énoncées par le gouvernement conservateur de Theresa May, qui aurait lié la Grande-Bretagne – bloquée par les accords d’Irlande du Nord – à l’union douanière, aux règles du marché unique sous la juridiction anti-syndicats de la Cour européenne de justice et à d’importantes contributions générales aux fonds de l’UE. Les craintes anti-Brexit concernant les avions qui ne volent pas, l’arrêt des importations de nourriture et de médicaments vitaux, la fin de la coopération contre le terrorisme et l’imposition d’une frontière physique à travers l’Irlande se sont tous avérés sans fondement, comme le Parti communiste l’avait prévu.
La souveraineté a été garantie pour le capitalisme britannique monopoliste – ce qui est fondamentalement différent de la souveraineté démocratique et populaire des travailleurs. Le nouvel accord, par exemple, ne permet pas légalement à un futur gouvernement de gauche en Grande-Bretagne, en Écosse ou au Pays de Galles de planifier le développement économique et de diriger les politiques des grandes entreprises capitalistes.
Quitter pleinement l’UE et son union douanière le 1er janvier 2021 peut faciliter à long terme la réalisation de ces objectifs. De toute évidence, ce n’est pas ce que le gouvernement conservateur a en tête. Au lieu de cela, la loi britannique sur le marché unique de Johnson (2020) saisit les pouvoirs économiques et industriels des parlements déconcentrés d’Écosse et du Pays de Galles, remettant ainsi en cause la démocratie économique régionale et nationale limitée gagnée par leurs peuples au cours des trois dernières décennies.
Le mouvement ouvrier et ses syndicats doivent maintenant entamer une lutte unitaire pour la souveraineté populaire à tous les niveaux face à une crise économique et sociale aggravée qui atteint déjà des proportions sans précédent – une crise que la Grande-Bretagne, actuellement soumise à la souveraineté des grandes entreprises du « marché libre », s’est révélée terriblement incapable de maîtriser.
De grandes batailles nous attendent dans la lutte pour l’emploi, les revenus et les services publics. Il faut résister aux accords de libre-échange entre la Grande-Bretagne et les autres pays qui incluent des dispositions pour une plus grande privatisation des services publics, ou pour que les investisseurs entrants renversent les politiques démocratiques des parlements centraux et décentralisés.
Dans le cadre de l’accord Royaume-Uni-UE, nous devons également veiller à ce que les dépenses publiques consacrées au soutien régional, social, scientifique et agricole soient maintenues ; que les normes pour les travailleurs, les consommateurs et l’environnement soient défendues et étendues; et que de nombreux pouvoirs d’élaboration des politiques rapatriés de Bruxelles soient dévolus comme promis aux parlements écossais et gallois.
https://www.communistparty.org.uk/united-struggle-for-popular-sovereignty
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