Luis Almagro, Secrétaire Général de l’OEA depuis 2015.
Créé en 1947 sous la houlette des Etats-Unis, l’Organisation des États Américains n’a jamais vraiment cherché à dissimuler sa marque de fabrique comme indiqué dans les documents déclassifiés de la CIA. Située à peine à deux rues de la maison blanche, l’Organisme visait la défense des intérêts des États-Unis au sud du continent américain contre l’Union Soviétique, réaffirmant ainsi l’actualité de la doctrine Monroe qui place l’Amérique latine au statut de chasse gardée de « l’empire ». Bien entendu tout ceci dissimulé sous une large couche d’euphémismes et de formules géopolitiques ronflantes qui ne tromperaient difficilement personne.
Dans la pratique la réalité est sans appel : Exclusion de Cuba en 1962 comme punition due à l’orientation patriotique, souverainiste et pro socialiste de la Révolution Cubaine, soutien non dissimulé aux dictatures de Videla, Pinochet et de pratiquement toute l’Amérique Latine mises en place par les États-Unis (tant qu’elles écrasent l’opposition de gauche, le piétinement des valeurs démocratiques n’est pas si important, de même que dans l’Espagne de Franco et au Portugal en Europe). Le clou du spectacle reste sans aucun doute le soutien à l’invasion de la république dominicaine par l’US Army en 1965 qui ira jusqu’à exiger l’envoi de contingents des autres pays membres sans pour autant se préoccuper de la violation flagrante de ses propres principes, une excuse sera formulée 50 ans plus tard en 2016 quand tout le monde, excepté le peuple dominicain, avait oublié les faits.
Avec la disparition du bloc soviétique l’OEA passe donc à rallonger la liste des veilles reliques de la Guerre Froide qui continuent d’exister, au côté de l’OTAN, et semblent vouloir prolonger leur survie au-delà du pronostic vital sérieusement engagé.
Pourtant face à la révolution bolivarienne naissante au Venezuela et l’arrivée de nouveaux gouvernements progressistes en Amérique latine dans les années 2000, qui cherchaient l’intégration et l’autonomie latino-américaine et refusaient les traités de libre-échange avec les États-Unis, l’OEA s’est vue réorientée vers un rôle de déstabilisation et changement de régimes en accord avec la nouvelle doctrine étasunienne pour permettre une reconquête du sous-continent, surtout face à la montée en puissance de la Chine qui est devenue aujourd’hui le principal partenaire commercial de l’Amérique Latine.
Caricature de Luis Almagro par la presse latinoaméricaine. Vicman.
Plus récemment, l’OEA, par le biais de son nouveau secrétaire général Luis Almagro, s’est magistralement illustrée par son soutien total au coup d’État fasciste en Bolivie en 2019 contre le président Evo Morales qui aura laissé un bilan humain de plusieurs centaines de morts ou encore par son silence complice sur la répression sanglante orchestrée par le régime uribiste de Ivan Duque contre le peuple colombien ou celui de Piñera au Chili en 2019. « Plus papiste que le pape » Almagro n’aura donc pas eu de mal à prendre des positions en apparence totalement contradictoires en fonction des pays latino-américains et des intérêts étasuniens dans la région passant de la condamnation totale de la « répression » de certains gouvernements à la condamnation de la « violence » des manifestations dans d’autres pays. L’organisme s’est bien évidemment positionné également en faveur des actes de déstabilisation organisés à Cuba contre les institutions de l’île cet été, en annonçant la réunion d’un « conseil permanent » qui, à l’instar du Groupe de Lima pour le cas du Venezuela, viserait l’ingérence et l’interventionnisme dans l’île majeure des Antilles.
À cette occasion, Bruno Rodriguez Parrilla, ministre cubain des Relations extérieures, avait annoncé le 29 juillet de cette année, par le biais de son compte Twitter, l’échec de la manœuvre anti-cubaine parrainée par l’Organisation des États américains (OEA). L’appel lancé aux membres de l’Organisation des États américains (OEA) pour « analyser » la « situation à Cuba » à des fins d’ingérence, avait échoué en raison du refus de la majorité de ses pays membres. Tous ces procédés rappellent l’écrasement de nos États européens sous la houlette atlantiste supranationale de l’UE visant le contrôle et la dislocation des États nations et des peuples européens.
Bruno Rodriguez a également remercié les pays « qui ont défendu la dignité de l’Amérique latine et des Caraïbes ». « La prochaine étape honteuse et annoncée du plan macabre contre Cuba est l’imposition du Conseil permanent de l’OEA. Le ministère étasunien des colonies, discrédité, est appelé à jouer son triste rôle de laquais », a posté quant à lui le Premier secrétaire du Comité central du Parti communiste de Cuba et président Miguel Diaz-Canel Bermudez. Le gouvernement des États-Unis a essayé d’utiliser de nombreux mécanismes de pression pour obliger les pays tiers à prendre position contre Cuba, une des nombreuses tentatives de manipulation que l’OEA facilite, conformément à son statut de laquais, mais qui a finalement suscité un rejet de la majorité des pays membres.
Caricature de Luis Almagro pendant la tentative de déstabilisation du Congrès aux Etats-Unis en Janvier 2021 intitulée « Les préoccupations de Luis Almagro et l’OEA. : Traduction « Mais qu’est ce qu’il vous arrive ? C’est là-bas qu’il faut piller et saccager! » dit-il en pointant du doigt le drapeau de Cuba, du Nicaragua et du Venezuela.
Cette position de Cuba se joint aux déclarations d’autres dirigeants latino-américains comme celle d’Andres Manuel Lopez Obrador, président du Mexique, proposant de remplacer l’OEA par un organisme « qui ne soit le laquais de personne » lors d’une cérémonie fêtant la naissance de Simon Bolivar, ou celle encore de son homologue argentin Alberto Fernandez datant du 30 juillet qui considérait l’OEA comme un organisme « sans aucune utilité ». Récemment après les élections au Nicaragua le gouvernement sandiniste réélu à confirmé sa sortie de l’OEA suite aux tentatives grossières d’ingérence et de déstabilisation. S’agira-t-il d’une énième crise transitoire ou cette fois-ci d’une crise définitive ?
Dans tous les cas l’organisme continuera de jouer son rôle de bureau des « colonies » des États-Unis avec comme prochain rendez-vous les élections de ce mois de novembre au Nicaragua où nous pouvons constater les habituelles sombres manœuvres de Washington pour imposer un candidat pro-yankee ou tout du moins déstabiliser et affaiblir le gouvernement sandiniste qui vise la réélection. Le PRCF et la JRCF se montre solidaires comme toujours avec le peuple nicaraguayen et les peuples latino-américains qui luttent pour leur souveraineté et leur indépendance comme nous l’avons publié hier pendant le scrutin au Nicaragua.
Finalement tout dépendra du résultat des luttes sociales et politiques en Amérique Latine, tout particulièrement de la victoire de la constituante au Chili ou du succès du gouvernement progressiste au Pérou de Pedro Castillo, (du retour de Lula au Brésil, et bien d’autres etc.) qui, même s’ils ne doivent pas être idéalisés, pourraient établir à terme une conjonction de forces favorables au développement d’un nouvel ordre progressiste sur le sous-continent sur la base du patriotisme et du souverainisme ainsi qu’à la recherche d’une société socialiste, véritable alternative au cauchemar capitaliste dans lequel sont plongés les peuples latino-américains et du monde entier.
0 commentaires