Suite à un entretien avec nos camarades boliviens, nous avons décidé de retranscrire et publier une partie de nos échanges à propos de leur organisation et de la situation que traverse la Bolivie actuellement suite aux nombreuses menaces de coup d’état 2.0 et les menaces de mort contre le président Luis Arce du Mouvement vers le Socialisme (MAS).
Pouvez-vous vous présenter très brièvement aux lecteurs de notre blog JRCF ?
Nous sommes la Jeunesse Communiste de Bolivie, détachement de jeunesse du Parti Communiste de Bolivie. La Jeunesse communiste de Bolivie, JCB, a été fondée le 27 juin 1953. Depuis sa fondation, la JCB a joué un rôle de premier plan dans les luttes de la jeunesse bolivienne, en aidant et en promouvant l’organisation des jeunes dans différentes organisations syndicales. Les premières fédérations de lycéens et de normalistes (futurs enseignants) ont été organisées sous notre bannière. De même, nous avons été constructeurs de la Confédération universitaire bolivienne. Sous la direction communiste, la jeunesse bolivienne a combattu avec audace et fermeté les différents régimes dictatoriaux qui ont ravagé notre pays.
Actuellement, quelles sont vos principales actions et le travail politique avec les jeunes en Bolivie?
Les principaux lieux d’action politique de la JCB sont l’Université et les fédérations d’étudiants du secondaire. Nous sommes actuellement en train de travailler avec des jeunes de différentes régions du pays et de diverses activités dans le cadre de processus de formation politique. Nous allons bientôt commencer notre première école de formation politique. De même, nous nous engageons à assurer la continuité de Temple, notre organe politico-culturel de diffusion, et nous préparons un travail à moyen terme avec de jeunes travailleurs, principalement d’usines situées dans des centres urbains.
Quelle est votre analyse de la situation actuelle en Bolivie et en Amérique latine?
Actuellement, l’Amérique latine est un continent où l’on vit les conséquences de nombreuses années de progressisme et de doctrines « socialistes » non scientifiques et antimarxistes, comme le socialisme du XXIe siècle, conséquences qui se manifestent tant sur la vie économique des personnes que sur la capacité d’organisation et l’indépendance des travailleurs. Cependant, un scénario important s’ouvre dans certains pays où les partis communistes ont très bien su différencier leur ligne politique propre du discours opportuniste officiel. Cette indépendance politique, comme il se doit dans une organisation à l’avant-garde de la classe ouvrière, apporte sans aucun doute d’énormes avantages, car les travailleurs découvrent tôt ou tard l’insuffisance du programme progressiste à trouver une solution définitive aux problèmes systémiques du capitalisme et de ses crises, et ils assument leur rôle de classe aux côtés de leur Parti communiste. D’autre part, dans d’autres pays, il existe encore une certaine subordination ou adhésion à des lignes étrangères au marxisme-léninisme – on exalte les luttes qui ne sont pas dans l’intérêt de la classe ouvrière et on exalte le progressisme. Nous croyons sans aucun doute que ces doctrines de gestion et d’humanisation du capitalisme ne font que retarder l’organisation nécessaire des travailleurs dans leur lutte pour une solution définitive à la pauvreté, au retard, à l’analphabétisme, à l’insécurité sociale, au manque de soins et à l’exploitation de l’homme par l’homme.
Le contexte bolivien s’inscrit parfaitement dans ce qui précède. Nous nous dirigeons vers 20 ans de gouvernement progressiste, des années au cours desquelles nous ne pouvons cacher que plusieurs choses ont changé, surtout sur le plan culturel mais aussi sur le plan économique. Les premières années du gouvernement d’Evo Morales ont été marquées par plusieurs nationalisations, notamment de ressources naturelles et de quelques entreprises stratégiques. Mais la direction du parti au pouvoir n’a jamais été vers la construction du socialisme, et même beaucoup de ses éléments se sont montrés avec des positions anti-ouvrières et anticommunistes. Près de 20 ans plus tard, nous rencontrons les mêmes problèmes que ceux que nous évoquions : pauvreté, retard, analphabétisme, insécurité sociale, etc. À cette situation s’ajoute un quasi-démantèlement de l’indépendance syndicale des organisations ouvrières. En Bolivie, il est donc difficile d’offrir une alternative concrète au gouvernement actuel. C’est dans ce contexte que le coup d’État de 2019 a été organisé et exécuté, et c’est pour ces raisons qu’il n’y a pas eu de réponse massive, immédiate et organisée du peuple. Un coup porté par un groupe de réactionnaires eux-mêmes désorganisés, mais qui, avec l’aide de l’ingérence étrangère, ont pu le faire avancer, un danger qui persiste encore aujourd’hui. Nous sommes conscients que la sortie de cette situation passe par le renforcement du Parti Communiste, fortement imprégné des principes marxistes-léninistes, indépendant du gouvernement en place et fortement présent dans les organisations de masse, ouvrières, étudiantes, paysannes, d’enseignants, etc.
Manifestation de la JCB à La Paz
Comment analysez-vous la situation de guerre en Ukraine et la perspective d’un nouveau conflit mondial ?
Les communistes doivent se battre pour les intérêts des travailleurs qui ne s’expriment certainement pas dans un conflit impérialiste. Nous ne nous alignons ni sur la Russie ni sur l’Ukraine. D’une part, nous dénonçons les intérêts prédateurs de l’OTAN, de l’UE et des États-Unis qui cherchent à tirer profit des catastrophes provoquées par la guerre. Nous dénonçons également l’intervention militaire russe qui cherche à étendre sa zone d’influence aux pays de l’ex-Union soviétique.
Le peuple ukrainien est victime du conflit impérialiste depuis près de 10 ans, sa situation s’étant aggravée avec le coup d’État de 2014. Il ne fait aucun doute que le néonazisme né en Ukraine pendant le coup d’État doit être combattu sans relâche, et c’est ce que le peuple travailleur ukrainien fait courageusement depuis des années. Notre solidarité militante est avec eux! Cependant, nous ne devons pas oublier que ces mouvements néonazis comme Svoboda, Secteur droit et le bataillon Azov, ont été engendrés et alimentés par l’impérialisme occidental dans l’intention de s’en servir dans sa lutte contre la Russie. Cela nous confirme que les mouvements nationalistes d’extrême droite, comme le nazisme allemand, le fascisme italien et le phalangisme espagnol, sont une créature du capitalisme, comme l’avaient déjà dénoncé Gramsci et Dimitrov, entre autres. Ce n’est pas un hasard si ces groupes se caractérisent par un anticommunisme fervent. Bien que Zelensky ait interdit plusieurs mouvements politiques ces derniers jours, le Parti communiste est illégal et ses militants persécutés depuis 2014.
Le capitalisme a toujours mené le monde à la guerre, et en ce sens, un nouveau conflit mondial ne peut être exclu. Depuis la chute de l’URSS, les guerres dans le monde se sont multipliées, et cette nouvelle guerre nous rapproche de la possibilité d’un conflit à l’échelle mondiale. Notre lutte est pour la paix, mais pas une paix quelconque, la paix anticapitaliste et anti-impérialiste qui est la seule paix véritable et qui ne peut prospérer que grâce au triomphe du socialisme. Notre lutte pour la paix est la lutte pour le socialisme, dans notre pays et en solidarité avec les autres.
Quel serait votre dernier message pour les jeunes du Pôle de Renaissance Communiste en France ?
Nous saluons tous les militants de la JRCF. Dans cette crise capitaliste aggravée par la situation sanitaire et par la guerre, la lutte permanente des militants communistes qui brandissons les principes du marxisme-léninisme est indispensable pour mettre fin à la barbarie capitaliste. L’importance de notre lutte, permanente et dévouée, est cruciale !
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