Constantin Theotokis est un auteur grec proche du naturalisme, né en 1872 avant de mourir en 1923. Son livre L’honneur et l’argent a été publié pour la première fois en 1914 ; il fait seulement quelques centaines de pages. Theotokis, bien qu’inconnu chez nous, est relativement célèbre en Grèce. Notre écrivain provient d’une ancienne famille aristocratique de Corfou et s’est marié à une riche héritière de la noblesse austro-hongroise. Cependant, il décide en 1908 de renoncer à la totalité de ses droits sur l’héritage paternel, même celui de comte, avant de fonder en 1910 le groupe socialiste de Corfou. C’est cette conscience sociale qui explique sans doute une partie de son œuvre, qui porte justement sur les plus humbles et les préjugés de caste.
Le synopsis du livre : l’amour impossible entre Andreas, héritier d’une lignée de notables ruinés, et Rini, aînée d’une famille d’ouvriers, dont le père est un ivrogne tandis que la mère, Epistimi, s’acharne au travail pour constituer la dot de ses enfants. Cependant, Andreas oscille entre son amour réel pour la jeune fille et l’argent qui lui permet de maintenir son statut de notable sans avoir à travailler.
Le style est simple et permet une lecture facile – toutefois le traducteur n’ayant pas pu traduire toutes les expressions utilisées par les personnages, il les a donc purement et simplement retirées.
Avec la siora Epistimi, l’auteur nous offre un personnage féminin d’envergure, qui ne se laisse pas faire et tente même un acte désespéré contre l’injustice. Elle représente la parfaite travailleuse qui n’a pas peur de dire la vérité et de faire ce qui est juste. On sent que l’auteur dans sa description a un certain respect pour elle. Sa fille, bien que plus naïve, suivra finalement ses pas et s’affranchira aussi par la même occasion des conventions.
Le thème du roman c’est l’amour dans le cadre d’un rapport de classe. C’est par l’intermédiaire du personnage d’Andreas qu’on le comprend le mieux. Élevé dans une famille de notables qui ne travaillent pas mais emploient les autres, le fait de travailler sous les ordres de quelqu’un lui est insupportable et, pire, attente à son honneur, au même titre que de laisser sa femme travailler. C’est là son drame, car par un préjugé obtus, il s’attaque lui-même à son histoire d’amour. En effet, espérant tout de la dot de la famille de Rini, il s’emploie par tous les moyens à convaincre la mère de lui donner plus que les 300 pièces prévues (elle garde le reste pour ses autres enfants), y compris en forçant le mariage en couchant avec sa fille pour provoquer sa grossesse. Ce chantage ne fonctionnant pas, il envisage même de renvoyer sa bien-aimée sans l’avoir épousée pour prendre à la place une riche héritière, ce qui sera la goutte de trop. Avec ce dernier acte, il attente à l’honneur de Rini, car à cette époque c’est une honte absolue pour une fille non mariée d’avoir un enfant. Andreas brise à tout jamais sa possibilité d’aimer autre chose que l’argent. Le drame vient du fait que les préjugés de classe, même dans une chose aussi naturelle que la relation amoureuse, peuvent être porteurs de malheur. Il est donc important de nous en libérer pour commencer à vivre une vie digne.
Ambroise-JRCF
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