La « tête de pont de la démocratie » nous mène à la guerre !

par | Mai 29, 2025 | Théorie, histoire et débats | 0 commentaires

La propagande bourgeoise nous répète sans cesse que l’Union Européenne est une nécessité et un progrès pour la paix, le développement économique et la démocratie. Mais la réalité est toute autre. En fait, toute l’histoire de la “construction européenne” est l’histoire de l’union monopolistique des capitaux européens et américains dans un contexte de rivalités inter-impérialistes et au détriment de la paix, de la démocratie et des travailleurs (1).

I – Origines et histoire de l’Union européenne

Dès le début de l’entre-deux guerres, les États-Unis, qui s’étaient alliés à l’entente pour contrer le grand concurrent allemand, ont tout fait pour saboter le Traité de Versailles imposé par le capital financier français à l’Allemagne – traité qui prévoyait notamment le paiement des réparations par cette dernière. Leur objectif était de rétablir, sous leur direction et leur domination, la puissance économique de l’Allemagne, un de leurs principaux partenaires économiques avant la guerre, tout en affaiblissant la concurrence des impérialistes anglais et français. Ils ont accompli cela par une succession d’étapes clés : d’abord en contraignant la France à évacuer la Ruhr en 1923, puis en instaurant le plan Dawes en 1924 – mécanisme dual réduisant simultanément les réparations allemandes tout en ouvrant le flux des prêts américains indispensables à la reconstruction industrielle et militaire du Reich. Les accords de Locarno (fin 1925) vinrent ensuite verrouiller diplomatiquement la France, avant que le plan Young (1929) et le moratoire Hoover (1931) ne scellent définitivement l’abandon du système réparatoire.

Mais la France, dans la même logique contradictoire d’intrication des capitaux et de rivalités inter-impérialistes, tout en persistant donc à exiger le paiement des réparations, renforça elle-même sa collaboration avec le capital financier allemand dès le début de l’entre-deux guerres en violant les clauses de désarmement de Versailles qu’elle avait elle-même imposées. Cela commença dès 1920 avec un accord de cartel franco-allemand de la Chimie, s’amplifia avec la création du cartel IG Farben (1925), puis culmina dans des accords déséquilibrés en 1927-1928 entre l’IG Farben et la CMC-Kuhlman. L’industrie lourde suivit le même chemin via le cartel international de l’acier (1926), précurseur de la CECA et, là encore, dominé par le capital allemand auquel s’adjoignirent, en plus des capitaux français, les capitaux britanniques et américains. Ainsi le réarmement du Reich fut-il soutenu par un complexe financier transatlantique, où l’apport américain s’articulait avec la complicité active des capitaux européens. Cette dynamique, nourrie par l’anticommunisme post-1917 et renforcée par le choc de 1929, devait finalement saper les fragiles équilibres européens et précipiter l’humanité vers la Seconde Guerre mondiale.

Cette intrication monopolistique croissante des capitaux sous domination américaine obéit aussi à une logique de maximisation des taux de profit, réalisée par l’augmentation des prix et par la diminution des salaires. Le « modèle social » proposé par les nazis, basé sur l’exploitation absolue des travailleurs, la haine anticommuniste et la destruction des organes de classe du prolétariat, séduisait les capitalistes. C’est d’ailleurs massivement financé par le capital financier allemand et étranger que le NSDAP parvint au pouvoir en 1933. Cela explique les politiques de collaboration de plus en plus actives à partir de 1935 qui, sous couvert d’une volonté d’ « apaisement » (appeasement) pour éviter la guerre, laissèrent aux fascistes les mains libres en Éthiopie, en Espagne, en Rhénanie, en Autriche puis en Tchécoslovaquie. Ces politiques furent suivies de ce qui au fond n’en est que la continuation, à savoir le « choix de la défaite » (2) de 1940 et la collaboration franco-allemande sous Pétain. Ce processus d’intrication des capitaux franco-allemands, cette fois sous domination allemande et non américaine, se poursuivit naturellement durant l’occupation – sous prétexte notamment d’émanciper l’Europe de la domination américaine – avec la création du Comité automobile européen le 1er novembre 1940 et le cartel de l’assurance en février-mars 1941.

En réalité, ce pseudo anti-américanisme ne dura pas longtemps, puisque dès juillet 1941, le capital financier commençait déjà à voir que l’Allemagne ne remporterait par la guerre face à la résistance acharnée des soviétiques, et que l’Europe d’après-guerre serait dominée par les États-Unis. Cette domination serait fondée sur les 14 points de Wilson. Proposés en 1918, les impérialismes rivaux français et anglais avaient timidement résisté à leur application. Ces points consacraient la liberté de circulation des hommes et des marchandises en Europe, avec union douanière et ouverture au commerce extérieur, cela sans que les États-Unis renoncent à leurs propres barrières protectionnistes. Le but était de permettre aux marchandises américaines, produites en masse depuis 1918 grâce à une économie américaine d’après-guerre florissante, de s’écouler sans entraves sur le marché européen. Cela aboutit d’abord au plan White et aux accords de Bretton Woods en Juillet 1944 qui consacrèrent la domination du dollar sur le monde par la création du Fonds Monétaire International (FMI) puis de la Banque Internationale (future Banque Mondiale), tous deux sous contrôle américain, et par la consécration du dollar-or comme unique étalon monétaire mondial.

Puis vint le plan Schuman, porté par le collaborationniste ultra-clérical très apprécié des américains Robert Schuman, débouchant sur le Traité de Paris en 1951 qui, dans la droite ligne du cartel international de l’acier de 1926, entérina la création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA). Son but était de mettre en commun les productions françaises et allemandes de charbon et d’acier, c’est-à-dire concrètement de créer un cartel franco-allemand dirigé par la Haute autorité, une entité supranationale indépendante des États dirigée par de pures technocrates, ancêtre de la Commission européenne. La création de la CECA, entérinant de fait une intégration européenne sectorielle, constitue ainsi le premier pas vers la création d’un marché commun européen sous domination américaine. Dans le même temps, en 1950, un projet d’armée supranationale européenne voit le jour sous la forme de la communauté européenne de défense (CED), projet avorté en 1954 sous la pression des communistes, des gaullistes et d’une partie de la gauche non communiste. Des tentatives de réactivation du projet ont sans cesse eu lieu depuis, avec une intensité toute particulière depuis la guerre en Ukraine…

La création de la CECA, tout comme ce qui suivra dans les années suivantes, a été imposée par les États-Unis via le chantage du Plan Marshall : les États-Unis conditionnaient les prêts du plan Marshall, nécessaires aux pays européens pour leur reconstruction d’après-guerre, à l’engagement dans un processus de « libération des échanges » et à l’importation de produits américains, pour permettre ainsi une véritable invasion économique et culturelle américaine et une mainmise politique sur les États européens. Les buts étaient multiples : ouvrir le marché européen aux marchandises américaines, soumettre économiquement et politiquement les États européens, contrer les partis communistes dont la propagande trouvait un terreau fertile dans la crise économique d’après-guerre, et réarmer l’Allemagne de l’Ouest afin de constituer un rempart en Europe contre l’URSS, cela dans un contexte de guerre froide et de propagande anticommuniste massive. Ainsi naissait la fameuse « tête de pont de la démocratie ».

En 1957, un pas en avant capital vers « l’intégration européenne » a été fait avec la signature – dans la continuité du Traité de Paris – du Traité de Rome et avec la création de la Communauté économique européenne (CEE) et de la Communauté européenne de l’énergie atomique (CEEA). LCe traité de Rome réalisa les vœux américains exprimés dans les 14 points de Wilson en établissant plusieurs mécanismes clés : un marché commun pour l’ensemble des produits, des règles européennes de concurrence dite « non faussée » qui restreignirent considérablement la capacité des États à réguler leur économie et prohibèrent de facto toute orientation socialiste de la production. Il instaura également une politique agricole commune (PAC), une union douanière dotée d’un tarif extérieur commun (TEC) – limitant ainsi la souveraineté des États en matière de politiques protectionnistes – ainsi que l’abolition des frontières économiques intérieures. Cette dernière mesure permit la libre circulation des marchandises, des travailleurs, des services et des capitaux, créant ainsi un cadre favorable aux intérêts capitalistes par la mise en concurrence des travailleurs et la facilitation des pratiques de délocalisation (le fameux dumping social).

En 1986, l’acte unique européen (AUE) fut signé. Il renforça la libre circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes en créant le « marché unique », c’est à dire en supprimant les barrières non tarifaires, en allégeant les contrôles frontaliers et en harmonisant les normes techniques et fiscales. La libre circulation des capitaux, qui était encore soumise à certaines conditions, devint totale et inconditionnée : interdiction pour tout État membre d’empêcher les mouvements de capitaux au sein du marché unique européen, ce qui revient au fond à donner un cadre juridique légal à l’évasion fiscale. Cela permet notemment de faire pression sur les États pour alléger la fiscalité à l’avantage des plus riches et au détriment du financement des services publiques et des droits sociaux (voilà la véritable origine du fameux « trou de la sécu « ). La propagande bourgeoise a donc d’une certaine manière raison lorsqu’elle critique le programme économique de Mélenchon qui maintient le flou sur la question de la sortie de l’UE (il parle de « désobéir aux traités » : que cela veut-il dire concrètement, si cela n’est pas lié à une sortie de fait de l’UE ?), lorsqu’elle explique que la fiscalité qu’il veut imposer aux grandes fortunes conduira à une fuite des capitaux. Ce qu’elle se garde bien de rappeler par contre, c’est qu’il existe une alternative économique au modèle néolibéral américano-européen, à savoir celui du CNR.

Outre ces réformes visant l’union économique, l’acte unique européen mit en place les premiers jalons d’une union politique européenne, union politique qui se concrétiseras en 1992 avec le Traité de Maastricht. L’AUE instaura en effet le vote à la majorité qualifiée au Conseil sur les questions de marché intérieur (jusque-là, grâce à une relative résistance de De Gaulle, les États possédaient un droit de veto qui leur permettait de garder une certaine souveraineté sur ces questions), renforça le rôle du Parlement européen avec l’introduction de la procédure de coopération, et mit en place la coopération politique européenne (CPE) pour coordonner les politiques étrangères des États membres. Par ailleurs, c’est à partir de ces années-là que le droit européen fut officiellement reconnu par la France comme constituant un bloc de constitutionnalité supérieur au droit national (3).

C’est ainsi que le programme du CNR – porté par les résistants communistes – qui impliquait la nationalisation des secteurs clés de l’économie, un contrôle et une planification économique de l’État social, des droits sociaux garantissant les travailleurs contre l’anarchie de la production capitaliste comme la sécurité sociale et les retraites par répartition, devint dans sa substance purement et simplement illégal. En effet, les nationalisations devinrent légalement quasi-irréalisables du fait du principe de la « concurrence libre et non faussée » (4), l’État stratège disqualifié par le droit européen, et la solidarité entre les travailleurs suspecte dans la mesure où elle fausse la concurrence. Cela signifie que le programme du Conseil National de la Résistance ne peut plus être défendu dans le cadre des traités européens. Cela signifie aussi que la véritable nature du « projet européen » s’est manifesté au grand jour : union du capital financier, division des travailleurs, gouvernement technocratique supranational et dépeçage des souverainetés nationales, soumission des peuples aux projets impérialistes du capital financier américano-européen, destruction de toutes les conquêtes sociales des travailleurs et soumission totalitaire au parti unique capitaliste. Le programme du CNR et l’UE constituent deux projets absolument antagoniques : l’un vise les droits des travailleurs, la souveraineté nationale et populaire et le contrôle de l’économie dans une perspective d’émancipation nationale et sociale, l’autre vise le pouvoir absolu, antidémocratique, antisocial et transnational du capital financier. En d’autres termes, c’est une vision socialiste et une vision capitaliste qui s’opposent. Par conséquent, la « construction européenne » s’est révélée très clairement être un processus de destruction des acquis du CNR. L’AUE a constitué en cela un moment clé de l’histoire de la « construction européenne » : il correspond au moment où le socialisme comme programme politique concret est devenu purement et simplement illégal et où le capitalisme néolibéral est devenu juridiquement la seule et unique voie possible : « there is no alternative », dixit Margaret Thatcher.

En 1992, dans un contexte de chute du bloc soviétique, de réunification de l’Allemagne et de l’apparition de nouveaux marchés à récupérer à l’est, l’Union Européenne (UE) est officiellement fondée avec la signature du Traité de Maastricht. Alors que la CEE était une union supranationale essentiellement économique, un pas en avant décisif a été fait vers une union politique et monétaire. La libre circulation des personnes a été renforcée grâce à la création de la citoyenneté européenne. Le traité de Maastricht est basé sur trois piliers :

  • Le Pilier communautaire, qui repose sur des communautés contrôlées par des institutions supranationales puissantes : comprend la CEE, la CEEA devenue EURATOM, et la CECA. Il développe le marché unique européen où la concurrence est « libre et non faussée », réaffirme la primauté du droit européen sur le droit national, et donne un rôle central à la Commission européenne, au Parlement européen et à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).
  • La politique étrangère de sécurité commune (PESC) : l’UE devient officiellement un acteur diplomatique sur la scène internationale et peut envoyer des missions civiles ou militaires sous mandat du Conseil de l’Union européenne (composé des ministres des Affaires étrangères des Etats membres). Un premier pas est ainsi fait vers une défense européenne, même s’il n’est pas encore question de créer dans l’immédiat une armée européenne à proprement parler. Contrairement au pilier communautaire, celui-ci n’est pas dirigé par une institution supranationale mais par une coopération intergouvernementale, c’est-à-dire par des ententes entre les différents États membres.
  • La coopération en matière de justice et d‘affaires intérieures (JAI), permettant aux États membres de gérer en commun certaines questions liées à la sécurité intérieure des États membres. Idem, ce pilier repose sur une coopération intergouvernementale et non sur une institution supranationale.

L’Union économique et monétaire (UEM) a été créée avec le but de fixer le cadre pour la création d’une monnaie unique alignée sur le mark, à savoir l’euro, en fixant les fameux « critères de convergence » poussant à la réduction des dépenses publiques : Déficit public < 3 % du PIB, Dette publique < 60 % du PIB, Inflation et taux d’intérêt maîtrisés, Stabilité monétaire. La Banque Centrale Européenne (BCE) est créée dans le même temps et sera mise en place en Juin 1998. Elle est indépendante des États membres, ne peut ni prêter directement aux États, ni financer les déficits publics, et elle est chargée de la politique monétaire européenne et du maintien de la stabilité des prix selon les critères de convergence. Il devint alors pratiquement impossible pour les États d’utiliser la création monétaire afin de financer des investissements publics (écoles, hôpitaux, logements sociaux…), et les États durent dorénavent se financer sur les marchés financiers, donc à des taux d’intérêt déterminés par les banques. La politique monétaire fut donc confisquée aux gouvernements des États membres et les politiques publiques soumises aux intérêts du capital financier. Cette Union économique et monétaire, avec sa monnaie unique, la BCE et ses critères de convergence, a donc accentué le processus de démantèlement du programme du CNR, puisqu’elle empêche d’investir massivement dans les services publics, de relancer l’économie en période de crise par l’endettement public et de financer des politiques sociales ambitieuses. De fait, une seule politique budgétaire devint possible : l’austérité et la destruction progressive des services publics et de la sécurité sociale.

Le Traité d’Amsterdam a été signé en octobre 1997. Il intègre l’espace Schengen dans le cadre juridique de l’UE et transfère certaines compétences en matière de justice et d’affaires intérieures au niveau communautaire. Le traité a également accru les pouvoirs du Parlement européen en étendant la procédure de codécision et introduit le poste de Haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune. Puis le Traité de Nice a été signé en février 2001 dans l’optique de réformer les institutions de l’Union européenne pour préparer son élargissement vers l’Est. Il a modifié la composition de la Commission européenne, ajusté la pondération des voix au sein du Conseil de l’UE et étendu le vote à la majorité qualifiée à de nouveaux domaines. Le traité a également renforcé les pouvoirs du Parlement européen et introduit des mécanismes pour prévenir les violations des « valeurs fondamentales » de l’UE. Tout cela renforce les traités précédent, mais surtout prépare un nouveau saut dans la « construction européenne » et la mise en concurrence des travailleurs avec l’élargissement de l’UE vers l’est le 1er mai 2004. L’élargissement de l’UE aux pays de l’ex bloc soviétique à l’est de l’Europe a rendu possibles des délocalisations massives vers ces pays où les droits des travailleurs étaient quasi inexistants et les salaires très bas, où la fiscalité était extrêmement avantageuse pour les capitalistes voir quasi inexistante, et une utilisation massive des travailleurs détachés, renforçant ainsi le dumping social et fiscal.

L’UE telle que nous la connaissons aujourd’hui repose sur le Traité de Lisbonne, signé le 13 décembre 2007 et entré en vigueur le 1er décembre 2009. Reprenant les idées principales du Traité établissant une Constitution pour l’Europe (TECE) qui avait été rejeté en France par le Non victorieux au référendum de 2005, et validées cette fois-ci uniquement par voie parlementaire et sans consultation du peuple, il a supprimé les trois piliers du Traité de Maastricht pour les fusionner en une seule entité juridique unifiée. La PESC conserve sa nature intergouvernementale mais la JAI est largement supranationalisée en étant intégrée dans le droit commun de l’UE. Une charte des droits fondamentaux ayant valeur juridique contraignante est créée, c’est-à-dire concrètement une sorte de constitution européenne qui ne dit pas son nom, et qui avait été rejetée par le peuple en 2005. Bref, un pas décisif est encore fait en direction de l’union politique européenne, avec en fond la perspective d’un saut fédéral européen sur le modèle des États-Unis.

II- L’UE, « tête de pont de la démocratie » sur le continent eurasiatique

Pour bien comprendre ce qui se joue aujourd’hui en matière de relations et de tensions internationales, il est nécessaire de bien cerner le rôle géostratégique que joue l’UE pour les États-Unis sur le continent eurasiatique. La stratégie des États-Unis depuis la fin de la première guerre mondiale, c’est-à-dire depuis qu’ils sont en mesure d’aspirer à l’hégémonie mondiale, est de contenir, et même de repousser le bloc soviétique afin de le réduire à son expression la plus faible. Cette stratégie est suivie encore aujourd’hui malgré l’effondrement du bloc soviétique. Une fois le bloc soviétique effondré et la Russie réduite à ses frontières nationales, l’objectif a été d’étendre la sphère d’influence américaine toujours plus loin à l’est, d’abord par l’extension de l’OTAN, puis de l’UE, et d’éviter qu’un bloc Russie-Chine-Iran remettant en cause les aspirations américaines à l’hégémonie se constitue.

Concernant le rôle géostratégique de l’UE et de l’OTAN pour les États-Unis, il est intéressant de regarder ce qu’en disait en 1997 le très célèbre géopolitologue américain et conseiller à la sécurité nationale du président Jimmy Carter de 1977 à 1981 Zbigniew Brzeziński :

« Surtout, l’Europe est la tête de pont géostratégique fondamentale de l’Amérique. Pour l’Amérique, les enjeux géostratégiques sur le contient eurasien sont énormes. Plus précieuse encore que la relation avec l’archipel japonais, l’Alliance atlantique lui permet d’exercer une influence politique et d’avoir un poids militaire directement sur le continent. Au point où nous en sommes des relations américano-européennes, les nations européennes alliées dépendent des Etats-Unis pour leur sécurité. Si l’Europe s’élargissait, cela accroîtrait automatiquement l’influence directe des Etats-Unis. A l’inverse, si les liens transatlantiques se distendaient, c’en serait fini de la primauté de l’Amérique en Eurasie. Sa maîtrise de l’océan Atlantique, sa capacité à pénétrer en profondeur sur le continent se trouveraient très limitées. » (5)

Le but, à terme, était d’intégrer la Russie au bloc euro-atlantiste, d’en faire ainsi un État vassal des États-Unis, totalement « démocratisé », c’est-à-dire partie intégrante d’un vaste système mondial néolibéral sous hégémonie américaine. Il est d’ailleurs courant d’entendre dans les médias de propagande que l’OTAN ne constitue pas une menace pour la Russie. Encore une fois, il est intéressant de regarder ce qu’en disait Brzeziński :

« Ce que l’Europe, moderne, riche et démocratique, alliée à l’Amérique peut apporter à la Russie, aucune autre voie ne peut lui offrir. Ni l’Europe ni l’Amérique ne constituent une menace pour la Russie, tant qu’elle développe un Etat national et démocratique, sans visées expansionnistes ». (6)

C’est-à-dire, ne constituent pas une menace pour la Russie… tant qu’elle accepte de se soumettre au bloc UE-OTAN sous hégémonie américaine ! Conclusion logique : si la Russie ne se « démocratise » pas (comprendre… si elle ne se conforme pas au modèle néolibéral occidental imposé par les États-Unis) et ne développe pas un « Etat national sans visées expansionnistes » (comprendre… si elle ne renonce pas à redevenir une puissance régionale remettant en question l’hégémonie américaine en Europe de l’est), alors l’Europe et l’Amérique constitueront une menace pour la Russie ! CQFD

Le problème est que la Russie n’a, malgré le désastre économique, politique, culturel, social, idéologique et national de l’effondrement de l’URSS, jamais renoncé à court terme à être une puissance a minima régionale et à résister à la vassalisation, et à long terme à redevenir une puissance mondiale pesant dans les relations internationales. Face à cette résistance russe aux aspirations hégémonistes des États-Unis, la stratégie américaine a consisté à essayer de contraindre la Russie à renoncer à ses ambitions (7), cela en intensifiant et en forçant l’expansion du bloc UE-OTAN vers l’est afin de priver la Russie de sa zone d’influence historique en Europe de l’est (8).

À ce titre, l’Ukraine constitue un pivot géopolitique d’importance absolument cruciale, car sans l’Ukraine, la Russie est condamnée à être reléguée au rang d’une puissance simplement moyenne, sans possibilité d’occupation d’une position de domination même régionalement limitée, et incapable de constituer une menace pour l’hégémonie américaine (9). Pour la Russie, se voir coupée de l’Ukraine, c’est se voir coupée d’un pays de dizaines de millions d’habitants culturellement très proches de la Russie, ayant un fort potentiel économique de par ses ressources minières, son industrie et son agriculture, et ayant un accès privilégié à la mer Noire, Odessa étant une ville portuaire stratégique pour les échanges commerciaux avec le monde méditerranéen et au-delà. C’est pourquoi l’Ukraine constitue un enjeu absolument crucial pour la Russie, et par conséquent également, puisqu’une Ukraine sous influence russe signifierait un retour en puissance de la Russie dans la zone centrale et méridionale du continent eurasiatique, pour les États-Unis et leurs vassaux européens.

L’Ukraine a par conséquent constitué une cible privilégiée pour les États-Unis dans leur stratégie de refoulement de la puissance soviétique puis russe (10). La formation progressive d’une anti-Russie via le soutien tacite à l’ultra-nationalisme ukrainien et aux milices néo-nazies et via le soutien actif et revendiqué (11) à la « démocratisation » de l’Ukraine (12) (comprendre… sa libéralisation dans l’optique d’être progressivement intégrée à l’UE-OTAN) a alors été mise en place afin de provoquer une rupture des liens entre l’Ukraine et la Russie (13). Cela a d’abord abouti à ladite « révolution orange » de novembre 2004 qui a permis l’éviction du président élu Viktor Ianoukovytch, jugé trop proche de la Russie, et l’accession au pouvoir du pantin pro-européen à la solde des États-Unis Viktor Iouchtchenko. Puis en 2014, parce que Viktor Ianoukovytch fut réélu et qu’il a refusé de signer l’accord d’association entre l’Ukraine et l’Union européenne au profit d’un accord avec la Russie, une nouvelle « révolution de couleur », en réalité un véritable coup d’État proeuropéen et antirusse, a été organisée et financée par les États-Unis (14) (15), et armée par les milices paramilitaires ultranationalistes et néonazies de Svoboda, Secteur Droit et Azov. Ce coup d’État a abouti à la formation d’un gouvernement néofasciste sous la direction du milliardaire Petro Porochenko et à la nomination de néonazis à des postes clés de l’État, comme les membres ou anciens membres de Svoboda Oleksandr Sych – vice-Premier ministre –, Ihor Shvaika – Ministre de l’Agriculture –, Andriy Mokhnyk – Ministre de l’Environnement –, Ihor Tenyukh – Ministre de la Défense –, Oleh Makhnitsky – procureur général par intérim (poste stratégique) –, le membre de Secteur Droit Dmytro Yarosh – Député (2014-2019), Conseiller au ministère de la Défense, commandant de l’Armée des volontaires ukrainiens (UDA) –, ou les membres ou anciens membres du bataillon Azov Vadym Troyan – Chef de la police de Kiev (2014-2021), directeur par intérim de la police nationale (2015-2017) puis vice-ministre de l’Intérieur (2017-2019), –, et Serhiy Korotkykh – Chef du Département de la protection des objets stratégiques (ministère de l’Intérieur). L’influence d’Azov et de son réseau ne s’est pas limitée à des nominations officielles : une partie de l’appareil sécuritaire ukrainien a été restructurée en 2014–2015, notamment avec l’intégration de milices paramilitaires comme Azov dans la Garde nationale. Certains membres d’Azov sont passés par des structures hybrides (unités paramilitaires, forces spéciales, groupes de sécurité privée, etc.), souvent sous tutelle du ministère de l’Intérieur (dirigé alors par Arsen Avakov, qui protégeait politiquement ces réseaux) (16). En plus des postes publics, plusieurs figures d’Azov ont eu une influence informelle, parfois en encadrant des unités territoriales ou des milices urbaines « patriotiques ».

Ce coup d’État s’est accompagné d’une véritable propagande antirusse, notamment par le retrait du russe du statut de seconde langue officielle de l’Ukraine et par l’incendie de la maison des syndicats d’Odessa qui fit mourir le jeune communiste Vadim Papura (17), ce qui a conduit à la formation de gouvernements séparatistes prorusses en Crimée ainsi qu’à Donetsk et Lougansk. La Russie a réagi par l’invasion de la Crimée et le soutien aux forces séparatistes prorusses. Porochenko décida alors d’envoyer l’armée et les milices paramilitaires néonazies attaquer les républiques autonomes de Donetsk et de Lougansk, déclenchant une guerre civile ayant provoqué la mort de 14 000 personnes en 8 ans, principalement des civils ou résistants russophones (18). Pendant ce temps, le FMI et l’UE ont imposé des politiques ultralibérales : destruction du code du travail, réduction des subventions sociales, hausse des prix du gaz domestique, signature de l’accord UE-Ukraine en 2017 et demande formelle d’intégration à l’UE et à l’OTAN, etc.. Tout cela se fit sur fond de propagande anticommuniste, néonazie et russophobe : retrait du statut du russe comme seconde langue officielle de l’Ukraine, interdiction du parti communiste ukrainien en 2015 et destruction des monuments soviétiques avec les lois de décommunisation, réhabilitation des collabos Bandera et Choukhevytch ainsi que de l’UPA, etc..

Suite à ces événements, alors que la Russie était jusqu’à présent considérée comme un État à contenir mais relativement peu dangereux car terriblement affaibli et assimilable à terme au sein du bloc UE-OTAN, elle redevint un danger de premier plan pour les aspirations américaines à l’hégémonie. C’est alors que les États-Unis mirent en place des plans actifs pour affaiblir et déstabiliser directement la Russie. Comme l’expliquait en 2016 la RAND Corporation, think tank américain lié à l’US Air Force : « la Russie demeure un pays puissant qui parvient à concurrencer les États-Unis dans quelques domaines clés. Conscients qu’une certaine concurrence avec la Russie est inévitable, les chercheurs de la RAND ont mené une évaluation qualitative des options susceptibles d’imposer des coûts à la Russie, de la déséquilibrer et de la surcharger. » (19) Cela s’est manifesté par un soutien militaire à l’Ukraine, d’abord par l’envoi d’équipements non létaux à partir de 2014, puis d’armes létales à partir de 2017. Sur le plan économique, des sanctions économiques ont été imposées à la Russie. La propagande antirusse a été inténsifiée à l’extérieur (soutien à l’ultranationalisme russophobe ukrainien, propagande russophobe au sein des pays de la sphère d’influence américaine et notamment au sein de l’UE) et à l’intérieur de la Russie (soutien à Navalny). La Russie a été isolée diplomatiquement, les liens entre l’UE-OTAN et l’Ukraine renforcés, la présence militaire américaine au sein de l’UE et en Ukraine également, et la militarisation de l’OTAN a été intensifiée (Enhanced Forward Presence (EFP) : forces multinationales stationnées en permanence en Pologne, Estonie, Lettonie, Lituanie et dans la mer noire ; European Deterrence Initiative (EDI) : budget spécial US pour financer infrastructures, exercices, stocks prépositionnés ; construction de bases logistiques, aérodromes, dépôts d’armes dans l’Est de l’Europe ; création de centres de formation : les troupes ukrainiennes sont entraînées par des instructeurs principalement américains ; investissements dans l’amélioration de bases militaires ukrainiennes ; etc.).

Dans le même temps, depuis fin 2011, la Chine est progressivement devenue l’ennemi principal déclaré des États-Unis. Cela s’est manifesté d’abord avec la stratégie dite du pivot asiatique (20) sous Obama, puis en décembre 2017 sous Trump avec sa Stratégie de sécurité nationale (NSS) qui a désigné officiellement la Chine comme adversaire stratégique principal des États-Unis avec la Russie (21), puis en 2019 avec l’UE qui a donné à la Chine un statut de « rival systémique promouvant un modèle alternatif de gouvernance » (22). Tout récemment, le Project 2025 de la Heritage Foundation (23), think tank américain qui inspire largement, pour ne pas dire détermine franchement, la ligne politique adoptée par Trump, a placé clairement la Chine en position d’ennemi numéro 1 des États-Unis.

Malheureusement pour les américains, ce qu’il fallait éviter arriva. En 2021-2022, les USA commettent une erreur tactique qui va leur coûter chère. En 2021, les USA renforcent les liens entre l’OTAN et l’Ukraine en vue d’une adhésion future de l’Ukraine à l’OTAN (sommet de l’OTAN à Bruxelles en juin 2021 réaffirmant que l’Ukraine sera membre de l’OTAN, accord USA–Ukraine en Juillet 2021 sur la coopération stratégique, entraînements militaires conjoints, Annonce de 60 millions $ d’aide militaire supplémentaire en septembre 2021). Malgré des tentatives de négociations de la part de la Russie avec les États-Unis sur la non-adhésion de l’Ukraine à l’OTAN (24), celle-ci est réaffirmée constamment au nom du principe de la « porte ouverte » de l’OTAN (25). Comprenant pertinemment ce que signifierait une adhésion de l’Ukraine à l’OTAN, la Russie avait désigné l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN comme étant une ligne rouge. Une telle adhésion signifierait en effet une présence militaire américaine accrue en Ukraine, un rapprochement de la puissance nucléaire américaine des frontière de la Russie, et l’existence aux portes de la Russie d’une anti-Russie ayant les mains libres grâce au parapluie militaire otanien. Par ailleurs, après des « révolutions de couleurs » organisées et financées par les États-Unis en Ukraine, en Géorgie, au Kirghizstan et en Serbie dans l’optique d’intégrer ces pays à la sphère d’influence otanienne, ce serait logiquement au tour de la Russie d’être directement menacée par une « révolution de couleur » ayant pour but de la « démocratiser » afin de l’otaniser et de l’européaniser. Compte-tenu du renforcement des liens entre l’Ukraine et l’OTAN, il ne manquait plus qu’un élément déclencheur pour que la Russie, mise au pied du mur, décide d’intervenir directement sur le territoire ukrainien.

Cet élément déclencheur arriva le 18 février 2022 lorsque les troupes otano-kieviennes, armées et formées par l’OTAN, intensifièrent brutalement les tirs d’artillerie dans le Donbass (26), violant ainsi massivement le cessez-le-feu et signalant le déclenchement imminent d’un assaut otano-kievien dans le Donbass. Suite à cela, le 21 février, Poutine reconnaît l’indépendance des républiques populaires de Lougansk et de Donetsk et signe avec elles un accord d’amitié et d’assistance. Celles-ci demandent alors l’assistance militaire de la Russie, demande à laquelle la Russie répond par le déclenchement de « l’opération militaire spéciale » le 24 février 2022. Le bloc euro-atlantiste se retrouve alors à devoir financer et armer massivement l’Ukraine et les États-Unis enlisés dans un double front stratégique contre la Russie en Europe et la Chine dans l’indopacifique. En parallèle le bloc Russie-Chine-Iran se renforce (27) (28), ce qu’il fallait à tout prix éviter.

Aujourd’hui en 2025, la Russie est en train de gagner contre l’Ukraine, la Chine est en train de dépasser les États-Unis économiquement et à terme elle les dépassera militairement, politiquement, culturellement et idéologiquement, et des tensions s’accentuent dans plusieurs zones géostratégiques importantes sur le continent eurasiatique (Proche et Moyen-Orient, Asie méridionale, Taïwan, Corées). Les États-Unis risquent de ne pas pouvoir tenir la concurrence face à la Chine tout en continuant d’armer l’Ukraine face à une Russie qu’il n’est plus pertinent de continuer d’affaiblir puisque « [l]a Russie a déjà été considérablement affaiblie par la guerre, les États-Unis ne verraient donc que des avantages modérés à affaiblir davantage leur adversaire » (29). Par conséquent les États-Unis doivent opérer un virage tactique consistant, dans l’idéal à mettre fin à la guerre en Ukraine, et dans tous les cas à revoir la répartition des efforts entre les États-Unis et leurs alliés.

Il ne faudrait pas voir, comme certains par anti-trumpisme naïf (oui à l’anti-trumpisme intelligent, non à l’anti-trumpisme naïf), les négociations de paix tentées par Trump comme étant une simple mascarade visant à tromper la Russie et gagner du temps. Les États-Unis ont objectivement intérêt à un apaisement rapide du conflit en Ukraine pour les raisons suivantes : la Russie est déjà affaiblie, il y a un risque d’extension du conflit avec l’OTAN voir d’utilisation de l’arme atomique par la Russie, un renforcement très dangereux de l’alliance Russie-Chine-Iran, un risque de perdre encore des territoires ukrainiens, la nécessité de faire face à la Chine et à d’autres dangers menaçant la domination américaine sur le continent eurasiatique, et la guerre est source d’instabilité économique notamment du côté de la tête de pont géostratégique « démocratique » européenne, etc (30).

D’ailleurs en réalité, contrairement à la légende entretenue par une frange soi-disant souverainiste de la droite (Asselineau, Philippot, Dupont-Aignan), Trump, derrière ses discours pseudo-dissidents, ne fait qu’essayer d’appliquer pour l’essentiel ce qui était préconisé début 2023 par la RAND (31), à savoir faire en sorte d’éviter que la guerre se prolonge en :

  • Conditionnant l’aide militaire à l’Ukraine à son engagement à négocier tout en proposant des garanties de sécurité pour l’après-guerre
  • Garantissant la neutralité de l’Ukraine et sa non-adhésion à l’OTAN
  • Établissant des conditions d’allègement des sanctions contre la Russie
  • Considérant que la restauration du territoire ukrainien d’avant 2022, voir d’avant 2014, n’est pas la priorité pour les États-Unis, laissant ainsi ouverte la possibilité d’une reconnaissance de l’annexion de la Crimée, voir de l’annexion des territoires ukrainiens conquis par la Russie depuis 2022.

Mais le problème est qu’à l’heure où la Russie domine militairement, bien qu’affaiblie, on a du mal à voir comment elle pourrait tolérer des garanties de sécurité impliquant la présence de militaires occidentaux en Ukraine. Sergueï Lavrov a d’ailleurs rappelé que « la démilitarisation et la dénazification de l’Ukraine sont également à l’ordre du jour », et Poutine que des négociations ne pourront avoir lieu qu’à condition que les causes profondes de l’intervention militaire russe soient abordées (32). En même temps, les occidentaux ne peuvent pas laisser l’Ukraine sans garanties de sécurité, celle-ci étant trop importante pour l’hégémonie euro-atlantiste, d’autant plus depuis l’accord sur les minerais signé fin avril (33). Et l’Ukraine de Zelensky, de son côté, refuse de céder sur la question des territoires, et elle sait pertinemment que le bloc euro-atlantiste ne cessera pas l’aide à l’Ukraine (34) si elle poursuit la guerre. Et elle est d’autant moins sujette à accepter un accord de paix défavorable que l’Europe, sous l’impulsion de Macron, lui donne toutes les garanties d’un soutien occidental jusqu’au bout (35). Ainsi, bien qu’il y ait des raisons de penser que les négociations de paix aient été entamées par Trump avec un objectif réel de faire cesser les combats, cette volonté américaine se heurte aux intérêts ukrainiens et européens. Ce qui montre au passage que le bloc euro-atlantiste, bien que dominé par les États-Unis, n’est pas un bloc monolithique entièrement et mécaniquement soumis aux États-Unis et est, comme toute réalité matérielle (36), mû par ses contradictions internes. Cet État de fait est bien résumé par l’ancien ministre russe Alexander Temerko :

« Regardons la vérité en face. Premièrement, l’Ukraine n’acceptera pas de céder les territoires capturés et la Russie ne peut simplement pas renoncer à ce qu’elle a pris. Deuxièmement, avec un million de personnes tuées ou blessées, des maisons et des familles détruites, des personnes torturées, aucun traité de paix signé par cette génération n’aurait la moindre valeur. Par conséquent, il ne sert à rien de poursuivre une chimère. La solution sera nécessairement complexe et de long terme : la priorité doit aller à l’obtention d’un cessez-le-feu grâce à une pression accrue sur la Russie, à travers de nouvelles sanctions économiques et un effort européen de soutien en armes et munitions à l’Ukraine. » (37)

C’est donc un plan B qui s’impose : essayer de gagner du temps avec des négociations de cessez-le-feu et donner progressivement à l’UE la charge de défendre l’Ukraine pendant que les États-Unis se concentrent sur la Chine. Cela est résumé dans le Project 2025 de la Heritage Foundation :

« La Chine représente de loin le plus grand danger pour la sécurité, les libertés et la prospérité des Américains. […] Les États-Unis et leurs alliés sont également confrontés à de réelles menaces de la part de la Russie, comme en témoigne la guerre brutale de Vladimir Poutine en Ukraine, ainsi que de la part de l’Iran, de la Corée du Nord et du terrorisme transnational. […] Dans cette optique, la stratégie de défense américaine doit clairement identifier la Chine comme la priorité absolue de la planification de défense américaine, tout en modernisant et en développant l’arsenal nucléaire américain et en maintenant une entreprise antiterroriste efficace et performante. Les alliés des États-Unis doivent également intensifier leurs efforts, certains rejoignant les États-Unis dans leur lutte contre la Chine en Asie, tandis que d’autres prennent davantage l’initiative face aux menaces russes en Europe, en Iran, au Moyen-Orient et en Corée du Nord. En réalité, atteindre ces objectifs nécessitera davantage de dépenses de défense, tant de la part des États-Unis que de la part de leurs alliés, ainsi qu’un soutien actif à la réindustrialisation et un soutien accru aux capacités de production des alliés afin que nous puissions intensifier ensemble nos efforts dans le monde libre. » (38)

Un gain de temps est nécessaire non seulement pour que l’armée ukrainienne se reconstitue, mais aussi pour que l’UE s’unisse dans une stratégie cohérente de « défense européenne » et militarise son économie en vue de prendre une place de plus en plus importante dans la défense de l’Ukraine. L’UE est en effet quelque peu divisée depuis 2022, et même depuis 2014, entre la France occupant la place de fer de lance belliciste et l’Allemagne au bellicisme affirmé mais néanmoins plus hésitant. L’Allemagne était en effet avant « l’opération militaire spéciale », plus que la France, largement dépendante de la Russie pour son alimentation énergétique en gaz et entretenait des relations commerciales étroites avec la Russie notamment dans, outre l’énergie, l’automobile, la chimie et la construction mécanique. Elle a donc logiquement manifesté dans un premier temps une certaine réticence à couper les ponts avec la Russie (39). De plus, historiquement, l’Allemagne a compté sur les États-Unis pour sa défense dans le cadre de la « construction européenne » et de l’OTAN. Elle n’a par conséquent pas priorisé la constitution d’une armée européenne puissante, mais plutôt l’extension et l’approfondissement de sa zone d’influence économique en Europe de l’Est sous la couverture du parapluie militaire américain, ce qui pouvait difficilement la rendre à l’aise avec l’idée d’un transfert de la charge de la défense militaire européenne des États-Unis vers l’UE. Bref, manque d’unité stratégique européenne et dépendance militaire aux États-Unis ajoutés à une fragilité économique post-covid rendent délicate la question du transfert de la charge de la défense européenne, et par là nécessitent de gagner du temps.

Le bloc occidental doit donc gagner du temps en attendant que l’UE augmente son autonomie stratégique en se dotant d’une stratégie de défense commune, augmente ses capacités de production d’armement et de mobilisation, prenne les mesures économiques nécessaires au financement de l’économie de guerre, et renforce ses liens avec l’Ukraine dans la perspective d’une adhésion de l’Ukraine à l’UE. Plusieurs pas en avant sont faits dans cette direction. D’abord les sanctions économiques infligées à la Russie ont considérablement réduit les relations économiques entre l’Allemagne et la Russie (40). L’Allemagne a notamment été contrainte de sortir progressivement de sa dépendance au gaz russe en se tournant massivement vers le GNL américain : le gaz russe est ainsi passé de 45% des importations de l’UE en 2021 à 19% en 2024 (41). Et dans l’optique de rompre avec la dépendance de l’UE au gaz russe, la commission européenne a présenté une feuille de route visant à stopper les importations de gaz russe en Europe d’ici 2027 (42), cela au risque d’une augmentation des prix de l’énergie. La nomination de Merz à la chancellerie allemande suivie de son entrevue avec Macron qui a abouti à une entente sur un projet de conseil commun de défense et de sécurité (43), et l’annonce d’un plan de 800 milliards d’euros (44) par Ursula Von der Leyen pour la défense européenne (45), constituent un pas en avant vers une stratégie commune de défense européenne, cela au prix de nos retraites et de restrictions budgétaires en matière de santé et de protection sociale (46). Nous voyons donc que l’UE, sous l’impulsion de Macron (47), est prête à adopter la ligne la plus dure concernant l’Ukraine. Et de fait, c’est la zone d’influence européenne orientale, notamment allemande, qui se joue, zone d’influence fondamentale, comme nous l’avons vu précédemment, pour mettre en concurrence les travailleurs d’Europe et ainsi réduire les salaires, casser le code du travail et briser la sécurité sociale.

Sans les pays d’Europe de l’Est, c’est toute l’économie allemande qui risque d’entrer dans une crise mortelle pour les vœux allemands de puissance européenne. Après l’élargissement de l’UE vers l’Est (2004–2007), l’Allemagne a massivement délocalisé des segments industriels vers des pays comme la Pologne, la Tchéquie, la Slovaquie ou la Hongrie. Ceux-ci offrent une main-d’œuvre qualifiée à bas coût, une proximité géographique et une stabilité politique relative. Cette dynamique a abouti à une intégration verticale des chaînes de valeur : les pays d’Europe de l’Est produisent des composants, des pièces détachées ou réalisent des étapes intermédiaires (montage, assemblage), tandis que l’Allemagne se réserve les étapes à haute valeur ajoutée (ingénierie, conception, commercialisation). Ce schéma est particulièrement visible dans l’industrie automobile, la mécanique de précision et l’électrotechnique. En 2022, le commerce de l’Allemagne avec l’Europe centrale et orientale a atteint 562 milliards d’euros, un record. La Pologne est devenue le cinquième partenaire commercial de l’Allemagne, devant l’Italie ou le Royaume-Uni. L’Allemagne dépend de la région est-européenne non seulement pour sa production industrielle, mais aussi comme marché d’exportation. Depuis le début du XXIᵉ siècle, l’Allemagne a donc intégré l’Europe de l’Est dans son modèle industriel comme atelier de production à bas coût, essentiel à sa puissance exportatrice. Dans cette logique, la question ukrainienne représente à la fois un risque et une opportunité : la guerre menace la stabilité de cette zone clé pour l’économie allemande, mais l’Ukraine elle-même pourrait, à terme, devenir un nouveau maillon de ce réseau industriel. Le soutien allemand à Kiev s’explique donc autant par des raisons géopolitiques que par une volonté de préserver et d’étendre son espace économique à l’Est.

Contrairement à l’Allemagne, la France n’a pas développé une forte interdépendance industrielle avec l’Europe de l’Est. Ses liens économiques avec la région sont plus limités et centrés sur les services, la finance et quelques secteurs stratégiques (énergie, infrastructures). La question ukrainienne y est donc moins liée à une logique de coproduction qu’à une vision géopolitique : la défense de l’ordre européen face à la Russie. Le soutien français à l’Ukraine répond surtout à des impératifs géopolitiques et à la volonté de mettre en avant le rôle de la France dans « l’équilibre européen ». Et elle a grâce à Trump une occasion en or de jouer ses cartes pour le leadership européen, la ligne de la France étant depuis les débuts de la « construction européenne » celle d’un renforcement de l’autonomie stratégique et politique européenne en matière de défense, là où l’Allemagne avait une doctrine plus rattachée au parapluie militaire américain. Là encore, Trump ne fait que suivre, certes à sa manière propre, la feuille de route tracée depuis longtemps par les grands stratèges américains, notamment par Brzeziński qui expliquait que le soutien au projet européen allait à terme aboutir à une UE autonome traitant « d’égal à égal » avec les USA :

« En paroles comme en actes, il est important qu’elle [l’Amérique – ndlr] rappelle sa volonté de traiter un jour d’égal à égal avec l’Union européenne, sur toutes les questions de politique et de sécurité internationale, et qu’elle ne la considère pas comme un marché commun régional, constitué de pays liés aux Eats-Unis par l’OTAN. […] Dès que l’Europe trouvera une véritable identité politique et délèguera à l’Union européenne les fonctions d’un gouvernement supranational, l’OTAN devra procéder à sa réforme sur la base de l’équation 1 + 1 (les Etats-Unis à égalité avec l’Union européenne). » (48)

Et Brzeziński précise concernant le rôle de la France :

« L’intérêt des Etats-Unis consiste à exploiter la position dominante de l’Allemagne dans l’Europe atlantiste sans provoquer les inquiétudes de la France, de la Grande-Bretagne ou d’autres pays européens. […] A long terme, la France est un partenaire indispensable pour arrimer définitivement l’Allemagne à l’Europe. […] A long terme, […] le leadership allemand ne saurait être le moteur de la construction européenne. […] L’Europe ne se réalisera pas sous l’égide de Berlin. Voilà pourquoi l’Allemagne a besoin de la France, et l’Europe des relations franco-allemandes. Voilà pourquoi, encore, l’Amérique ne saurait choisir entre l’Allemagne et la France. » (49)

Ainsi, bien loin de l’idée stupide et naïve des Asselineau et compagnie selon laquelle il rabattrait les cartes en déstabilisant l’UE, Trump fait le nécessaire pour renforcer les relations franco-allemandes et mettre fin à la frilosité Allemande en matière d’unité et d’autonomie stratégique européenne.

Concernant la “guerre commerciale” lancée par Trump, elle s’inscrit elle aussi dans un bellicisme contre la Chine (50). Il s’agit notamment de faire pression sur l’UE pour la forcer à se détourner de la Chine pour se tourner d’autant plus vers les États-Unis (51) (52), et de contraindre l’UE à renégocier les accords commerciaux américano-européens. Le Project 2025 de la Heritage Foundation explique :

« le commerce transatlantique représente une part importante de l’économie mondiale, et il est dans l’intérêt national des États-Unis de l’amplifier, notamment parce que cela implique de sevrer l’Europe de sa dépendance à la Chine. Cependant, des tensions commerciales transatlantiques perturbent également les relations entre les États-Unis et l’UE et cela é été évident sous toutes les administrations. Les États-Unis doivent entreprendre une révision complète des accords commerciaux entre l’UE et les États-Unis afin de garantir un traitement équitable des entreprises américaines et de construire une réciprocité productive. » (53)

Bien entendu, compte-tenu de l’extrême concentration des capitaux américains et européens au sein de l’UE, aucune « guerre commerciale » réelle n’est envisageable entre les deux (54). La « guerre commerciale » entre les USA et l’UE n’est qu’une représentation théâtrale cachant de simples renégociations d’accords commerciaux entre capitalistes dominants et dominés.

Comme nous l’expliquions dans un autre article (55), il s’agit aussi pour les États-Unis de relocaliser l’industrie et de militariser l’économie afin de préparer le pays à la guerre. Là encore, le Project 2025 l’explique très bien :

« Les États-Unis d’Amérique sont la superpuissance dominante et demeurent l’arsenal mondial de la démocratie. Pour maintenir ce positionnement mondial – et ainsi protéger au mieux le pays et nos propres institutions démocratiques –, il est essentiel que les États-Unis renforcent leur base industrielle manufacturière et de défense tout en garantissant la fiabilité et la résilience de leurs chaînes d’approvisionnement dispersées à travers le monde. Cela nécessitera impérativement la relocalisation d’une partie importante de la production actuellement délocalisée par les multinationales américaines. La politique commerciale peut et doit jouer un rôle essentiel dans la renaissance de la base industrielle manufacturière et de défense américaine. » (56)

Enfin, en augmentant les tarifs contre la Chine, il s’agit de découpler l’économie américaine de l’économie chinoise :

« La leçon claire tirée des administrations Obama et Trump est que la Chine communiste ne négociera jamais de bonne foi avec les États-Unis pour mettre fin à son agression. Le président Trump a également tiré une leçon tout aussi claire, qu’il était prêt à mettre en œuvre lors d’un second mandat : la meilleure option politique consistait à se découpler économiquement et financièrement de la Chine communiste, car de nouvelles négociations seraient à la fois vaines et dangereuses. » (57)

Chose bien entendu impossible compte-tenu de l’interdépendance de toutes les économies du monde, comme le montre le renoncement à cette idée par un Trump mis en face de la réalité (58).

III- 20 ans après le NON, redisons NON… sur un autre ton !

L’UE est, nous l’avons vu, synonyme de contre-révolution sociale, de dictature supranationale et de guerre. Les jeunes n’ont pas d’avenir au sein de cette UE belliciste et réactionnaire. Il y a 20 ans, les bourgeois ont voulu nous « faire participer » à la construction européenne en invoquant un plébiscite pour l’UE déguisé en référendum. Malgré leur intense propagande médiatique en faveur de l’UE, ce plébiscite a échoué, puisque nous avons dit NON à la constitution européenne. Nous l’avons quand-même eue 2 ans plus tard sous Sarkozy avec le Traité de Lisbonne, adopté sans consultation du peuple. Et pour cause : l’UE est une nécessité pour la bourgeoisie. Elle constitue un enjeu économique et géostratégique primordial pour les États-Unis, elle est la « tête de pont de la démocratie » sur le continent eurasiatique. Si les États-Unis perdent l’Europe, c’est leur hégémonie sur le continent eurasien qu’ils perdent : « sur la périphérie occidentale, l’éviction des États-Unis par ses partenaires signerait la fin de la participation américaine au jeu d’échecs eurasien » (59) (p. 62). Le capital financier européen quant à lui joue ses profits. Sans progression de la « construction européenne », pas de « concurrence libre et non faussée », pas de « libre circulation des hommes, des biens, des capitaux et des services », bref moins de facilités pour faire du chantage à la délocalisation et au dumping social, un rapport de forces contre les travailleurs moins favorable, et des possibilités de réalisation de leurs ambitions impérialistes réduites. À l’heure où l’Union européenne se trouve confrontée à des problèmes économiques, politiques et géopolitiques profonds, et où la crise de la rentabilité et la remise en cause de l’impérialisme occidental battent leur plein, ralentir le pas en direction de l’Europe supranationale n’est pas une option pour la bourgeoisie. Par conséquent, il ne suffira pas de dire NON… car du consentement de Marianne (60), les capitalistes n’ont cure. Ce n’est pas en priant nos gouvernements d’écouter le peuple et la jeunesse que nous pourrons sortir du carcan euro-austéritaire et reprendre le chemin du progrès social. Nous devrons briser nous-mêmes les chaînes de l’Union européenne. Et cela ne sera possible qu’en se mobilisant massivement et en s’organisant contre la bourgeoisie. A l’heure où elle veut nous envoyer faire la guerre à la Russie, répondons en lui faisant la guerre à elle, car notre véritable ennemi est dans notre propre pays !

William-JRCF

(1) Ce qui suit sur les origines de l’UE est en très grande partie tiré de Annie Lacroix-Riz, Aux origines du carcan européen : la France sous influence allemande et américaine, Paris, Delga, 2016.

(2) Annie Lacroix-Riz, Le choix de la défaite

(3) C’est le 20 octobre 1989 avec l’arrêt Nicolo que le Conseil d’Etat en France reconnaît pleinement la primauté du droit international, et donc du droit européen, sur le droit national.

(4) L’UE prétend défendre une « concurrence libre et non-faussée » et utilise cette prétention pour imposer aux États membres, et en particulier à la France, l’ouverture des monopoles publiques à la concurrence. Mais justement, c’est bien aux monopoles publics que l’UE fait la guerre… au bénéfice des monopoles privés !

(5) Zbigniew Brzeziński, Le grand échiquier : l’Amérique et le reste du monde, Fayard, 2016, p. 88.

(6) Ibid, p. 157.

(7) « A plus long terme elle [l’Amérique – ndlr] doit encourager la transformation démocratique et le redressement économique en Russie. Il est indispensable qu’elle contre toute tentative de restauration impériale au centre de l’Eurasie, qui ferait obstacle à son objectif géostratégique numéro un : la mise sur pied d’un vaste système euro-atlantique, auquel la Russie elle-même a intérêt, puisqu’elle pourrait s’appuyer dessus pour garantir sa sécurité et sa stabilité. » (Ibid, p. 121).

(8) « La stabilisation économique et politique des nouveaux États contraint la Russie à une redéfinition historique de son identité. En conséquence, le soutien aux nouveaux États postsoviétiques, c’est-à-dire l’illustration du pluralisme politique dans l’aire de l’ex-Union soviétique, orientera la Russie vers l’option européenne. Parmi ces États, trois possèdent une importance géopolitique particulière, l’Azerbaïdjan, l’Ouzbékistan et l’Ukraine. » (Ibid, pp. 159-160)

(9) « L’indépendance de l’Ukraine modifie la nature même de l’État russe. De ce seul fait, cette nouvelle case importante de l’échiquier eurasien devient un pivot géopolitique. Sans l’Ukraine, la Russie cesse d’être un empire en Eurasie. […] Pour Moscou, […] rétablir le contrôle sur l’Ukraine – un pays de cinquante-deux-millions d’habitants doté de ressources nombreuses et d’un accès à la mer Noire –, c’est s’assurer les moyens de redevenir un État impérial puissant, s’étendant sur l’Europe et l’Asie. La fin de l’indépendance ukrainienne aurait des conséquences immédiates pour l’Europe centrale. La Pologne deviendrait alors le pivot géopolitique sur la bordure orientale de l’Europe unie. » (Ibid, pp. 74-75.)

(10) À noter que la question ukrainienne n’est pas nouvelle. Pour les impérialistes, cette « caverne d’Alibaba » a été une cible privilégiée : d’abord pour les allemands lors de la Première Guerre mondiale puis de la Seconde Guerre mondiale, ensuite pour les États-Unis (Annie Lacroix-Riz, « Impérialismes dominants en Ukraine de l’avant 1914 au sauvetage-recyclage germano-américain des criminels de guerre banderistes (1890-1990) » in Maxime Vivas, Aymeric Monville, Jean-Pierre Page (Dir.), La Russie sans œillères : du conflit en Ukraine au tournant géopolitique mondial, Paris, Delga, 2022.

(11) https://fr.sputniknews.africa/20250204/lusaid-a-injecte-un-milliard-de-dollars-en-ukraine-pour-soutenir-les-revolutions-de-couleur-1070491323.html

(12) https://colorrevolutionsandgeopolitics.blogspot.com/2011/07/template-revolutions-marketing-us.html

(13) https://www.les-crises.fr/u4-3-le-role-des-americains-et-des-europeens/

(14) https://www.les-crises.fr/la-face-cachee-de-la-crise-ukrainienne/

(15) https://www.youtube.com/watch?v=6VO0f43dcLQ&list=FLbTteALoYOupb-ua0wASyNg&index=6

(16) https://uacrisis.org/en/64197-paramilitary-natsionalni-druzhyny?utm_source=chatgpt.com

(17) https://www.initiative-communiste.fr/articles/international/odessa-justice-pour-vadim-et-les-autres/

(18) https://fr.wikipedia.org/wiki/Pertes_humaines_pendant_la_guerre_russo-ukrainienne

(19) https://www.rand.org/pubs/research_briefs/RB10014.html

(20) https://obamawhitehouse.archives.gov/the-press-office/2011/11/17/remarks-president-obama-australian-parliament

(21) https://trumpwhitehouse.archives.gov/wp-content/uploads/2017/12/NSS-Final-12-18-2017-0905.pdf

(22) https://commission.europa.eu/document/download/1fedf472-1554-416e-8351-1346f80a4ff8_en?filename=communication-eu-china-a-strategic-outlook.pdf

(23) The Heritage Foundation, Mandate for Leadership : The Conservative Promise, The Heritage Foundation, 2023. (https://www.democracydocket.com/wp-content/uploads/2024/06/2025_MandateForLeadership_FULL.pdf)

(24) https://www.france24.com/fr/europe/20211218-ukraine-les-%C3%A9tats-unis-pr%C3%AAts-%C3%A0-discuter-des-propositions-s%C3%A9curitaires-de-la-russie

(25) https://www.donbass-insider.com/fr/2022/01/15/rapport-de-situation-hebdomadaire-du-donbass-video-15-janvier-2022/

(26) https://www.donbass-insider.com/fr/2022/02/19/rapport-de-situation-hebdomadaire-du-donbass-special-militaire-video-19-fevrier-2022/

(27) https://lanouvelletribune.info/2025/01/chine-russie-un-partenariat-strategique-renforce/

(28) https://www.initiative-communiste.fr/articles/international/a-propos-du-recent-accord-strategique-entre-la-russie-et-liran/

(29) https://www.rand.org/pubs/perspectives/PEA2510-1.html#fnb18

(30) https://www.rand.org/pubs/perspectives/PEA2510-1.html#fnb18

(31) https://www.rand.org/pubs/perspectives/PEA2510-1.html#fnb18

(32) https://www.msn.com/fr-fr/actualite/monde/la-russie-rejette-l-accord-de-paix-du-pr%C3%A9sident-trump/vi-AA1DT5OC

(33) https://fr.euronews.com/my-europe/2025/05/02/toute-nouvelle-aide-militaire-americaine-a-lukraine-liee-a-laccord-sur-les-minerais

(34) https://legrandcontinent.eu/fr/2025/05/05/trump-a-discretement-autorise-laugmentation-des-transferts-darmes-et-dequipements-militaires-a-lukraine/

(35) https://www.lefigaro.fr/international/macron-merz-starmer-et-tusk-a-kiev-pour-afficher-l-unite-de-l-union-europeenne-derriere-l-ukraine-20250510

(36) https://vivelemaoisme.org/mao-zedong-de-la-contradiction-%E2%88%92-1937/

(37) https://www.lefigaro.fr/vox/monde/pendant-que-les-americains-renoncent-le-president-macron-prend-les-renes-du-soutien-europeen-a-l-ukraine-20250507

(38) Mandate for Leadership, op.cit, pp. 92-95.

(39) https://www.netpublic.fr/blog/allemagne-risques-dune-rupture-du-commerce-avec-russie/?utm_source=chatgpt.com

(40) https://www.euractiv.fr/section/international/news/les-exportations-allemandes-vers-la-russie-chutent-de-plus-de-50-en-2022/?utm_source=chatgpt.com

(41) https://www.letemps.ch/economie/energie/l-union-europeenne-presente-sa-feuille-de-route-pour-en-finir-avec-le-gaz-russe-d-ici-fin-2027

(42) https://www.challenges.fr/entreprise/energie/fin-des-importations-de-gaz-russe-lue-peut-elle-vraiment-atteindre-lindependance-energetique_603925

(43) https://www.rtl.fr/actu/international/l-allemagne-et-la-france-vont-mettre-en-place-un-conseil-de-defense-et-de-securite-commun-annonce-emmanuel-macron-7900502322

(44) https://jrcf.fr/2025/03/05/800-milliards-deuros-la-commission-europeenne-veut-mettre-larmee-europeenne-sur-les-rails/

(45) https://www.publicsenat.fr/actualites/international/defense-europeenne-que-contient-le-plan-annonce-par-ursula-von-der-leyen

(46) https://www.initiative-communiste.fr/articles/au-parlement-europeen-le-secretaire-de-lotan-ordonne-pour-depenser-plus-pour-la-guerre-de-reduire-notre-sante-notre-retraites-et-notre-securite-sociale/

(47) https://jrcf.fr/2025/03/11/pendant-que-des-negociations-de-paix-sont-en-cours-entre-trump-et-poutine-macron-et-lue-arment-leurope/

(48) Le grand échiquier, op.cit, p. 109.

(49) Ibid, pp. 110-112.

(50) https://jrcf.fr/2025/05/01/la-guerre-commerciale-est-lantichambre-de-la-guerre-mondiale-stoppons-les/

(51) https://jrcf.fr/2025/05/14/trump-lunion-europeenne-et-leconomie-de-guerre/

(52) https://www.portail-ie.fr/univers/2025/la-guerre-commerciale/

(53) Mandate for Leadership, op.cit, pp. 187-188.

(54) https://jrcf.fr/2025/03/16/lue-soppose-t-elle-aux-usa/

(55) https://jrcf.fr/2025/01/28/trump-et-le-protectionnisme-une-fausse-solution-aux-contradictions-du-capitalisme-un-veritable-symptome-de-sa-putrefaction/

(56) Mandate for Leadership, op.cit, p. 765.

(57) Ibid, p. 787.

(58) https://www.lemonde.fr/international/article/2025/05/12/les-etats-unis-et-la-chine-vont-suspendre-une-partie-de-leurs-droits-de-douane-punitifs-pour-90-jours_6605414_3210.html

(59) Le grand échiquier, op.cit, p. 62.

(60) https://georges-gastaud.com/publications/parution-de-marianne-ne-consent-pas/

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