Les salles de spectacles et de cinéma vont potentiellement rouvrir le 15 décembre, c’est un maigre soulagement pour le monde culturel qui a été le grand absent des mesures gouvernementales durant le confinement. En effet le gouvernement n’a pas su assurer les droits sociaux de toutes celles et tous ceux qui travaillent dans le spectacle, particulièrement pour les salariés intermittents et les artistes auteurs dont la précarité a explosé. De plus, plus d’une fois l’Etat a bafoué le droit de manifester de la CGT spectacle en refusant que certains rassemblements puissent avoir lieu. Malheureusement lorsque la culture est attaquée c’est tout le peuple français qui en subit les conséquences et cela doit nous interroger sur la place qu’occupe la culture à la fois dans nos vies et dans nos luttes. La culture sous toutes ses formes est notre meilleur atout révolutionnaire, comment la révolution française aurait-elle pu avoir lieu sans l’apport fondamental des lumières dans l’art et les sciences ? Si la politique tel que nous la défendons a pour but de rapprocher l’Homme de l’Homme, alors la culture que nous défendons poursuis le même but, car la culture est politique. Elle est politique lorsque le gouvernement la détourne de son principe élévateur pour la réduire à un simple divertissement. Elle est également politique quand le peuple se l’approprie pour la partager, la discuter et s’interroger sur le sens qu’elle donne à nos vies. Malheureusement nous voyons quel traitement les gouvernements euro-libéraux successifs concèdent à la culture, tout comme à l’éducation, la recherche ou aux sports. D’une part ils favorisent une culture conservatrice et contre-révolutionnaire, comme l’exemple du Puy du Fou l’a si bien démontré (1). D’autre part ils rendent la culture élitiste en asservissant toujours plus le prolétariat.
C’est la principale difficulté à laquelle on se heurte lorsqu’on prétend défendre la culture, son aspect si élitiste qui semble antinomique des intérêts du prolétariat. Pourtant, la culture a longtemps fait parti des aspirations populaires, le théâtre de Molière se moquait des bourgeois, et si on remonte encore plus loin les grecs louaient un culte à Dionysos, dont les festivités ont vu naître l’art du théâtre et de la tragédie. Si le théâtre et la culture avec lui ont pris un virage si élitiste, c’est le fruit de toutes ces années d’étouffement économique du secteur, couplé à un népotisme pour des divertissements tous plus asservissant les uns que les autres. La télévision a d’abord vu naître des téléfilms comme catégorie d’un sous cinéma, puis le même support à vu apparaître pléthore d’émissions de téléréalité en tout genre, toujours dans la même dynamique : pour tous les publics, toutes les bourses, tous les goûts. Aujourd’hui les plateformes de diffusion en continue, comme Netflix ou Amazon Prime, continuent de nous proposer les mêmes divertissements avilissant, mais à la demande. Pourtant, certains avis malhonnêtes rétorquerons que l’on peut trouver des films de qualités sur la plateforme Netflix, et qu’en cela il est seulement un outil. Malheureusement l’algorithme ne permet pas d’explorer le peu de contenu intéressant noyé dans une masse de production dont l’ultime usage est la consommation qu’on en fait. Ainsi le spectateur sera redirigé vers des programmes toujours plus insultant pour la culture populaire de tous les pays, à l’image de la série « Emily in Paris ». Pourtant si les nouveaux modèles de consommation états-uniens se plaisent autant à s’importer en France, ils n’aiment toujours pas y payer leurs impôts, comme c’est toujours le cas d’Amazon ou de McDonald’s. Netflix, à partir de Janvier, va enfin déclarer ses revenus en France mais qu’en est il de tout ce qui n’a pas été payé ? A titre d’information, le chiffre d’affaire du géant du streaming en France est estimé à 565,8 millions en 2019.
Enfin, une autre bonne nouvelle pourrait être l’augmentation du budget de la culture de 167 millions d’euros pour 2021, mais cela semble encore une fois être une maigre compensation face aux suppressions de postes dans l’audiovisuel, le management privé dans les services publics et la soumission de la culture aux lois du marchés. Les Romains dénonçaient déjà dans la formule « panem and circenses » l’usage qui était fait par les empereurs de la distribution de pain et de l’organisation de jeux pour s’attirer la bienveillance de l’opinion populaire, Macron est en campagne et nous ne sommes pas dupes. En revanche, comme le disait si bien le poème de James Oppenheim, « Du pain et des roses », repris dans l’excellent film « Pride » qui décrit l’aide historique apporté par le groupe « Lesbians and Gays Support the Miners » aux mineurs en grève contre la politique, déjà, néo-libérale de Margaret Thatcher :
« Alors que nous arrivons, marchant, d’innombrables femmes mortes
Pleurent alors que nous chantons leur antique cri pour du pain.
Leur esprit besogneux connaissait les petites œuvres d’art, l’amour et la beauté.
Oui, c’est pour le pain que nous nous battons – mais nous nous battons pour les roses aussi ! ».
Baba-JRCF
- : http://jrcf.over-blog.org/2020/09/puy-du-fou-plongee-dans-la-production-culturelle-reactionnaire.html
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