Guadeloupe : de quoi les violences sont-elles le nom ?

par | Fév 1, 2022 | Luttes | 0 commentaires

Dans la nuit du 20 janvier dernier, Pointe-à-Pitre (Guadeloupe) a été marquée par des affrontements violents entre manifestants anti-pass vaccinal et la police. Les affrontements auraient résultés par plusieurs manifestants et policiers bléssés sur place[1].

Depuis le 13 novembre 2021, la Guadeloupe connaît un mouvement social contre la mise en place du pass sanitaire, qui s’est ensuite étendu à la Martinique. Nous avions réalisé un communiqué en novembre dernier[2]à ce sujet. La grève générale avait été déclarée par les organisations syndicales, ce qui mena à de nombreux blocages. En réponse, l’État usa de la répression pour faire taire le mouvement, ce qui ne fit qu’aggraver les tensions. Pour rappel, les médias racontaient que la situation était devenue incontrôlable et les images qui nous en parvenaient nous montraient en effet une quasi-insurrection des guadeloupéens. La grève et les manifestations ont continué début janvier avec un peu moins d’intensité mais avec la volonté de s’inscrire dans la durée, d’autant plus que l’État a refusé de venir à la table des négociations et de parler des revendications concrètes du mouvement social[3].

Une manifestation a été décidée par les syndicats[4] ce 20 janvier 2022, pour porter à nouveau le mouvement social et faire avancer les revendications politiques du mouvement, qui ne se limitent pas au pass vaccinal. Au début de la journée étaient rassemblés des syndicats d’enseignants, d’infirmiers, d’agents de la sécurité sociale ou de sapeurs-pompiers dans un calme relatif. Cependant, la manifestation dérapa lorsque les gendarmes sont intervenus à coup de bombe lacrymogène pour empêcher un blocage. Cela a mené à la création de plusieurs blocages, notamment à Sainte-Anne, Petit-Canal ou Sainte-Rose, la plupart défaits dans la journée par la police. Comme dit en introduction, il semblerait que la police ait été visée par des tirs en riposte, mais nous n’en savons pas plus.

Il y a quelques jours, nous avons appris une information intéressante. Pendant des mois voire des années, des gangs, avec l’aide d’un policier corrompu, organisaient des actions de casse contre certaines enseignes ou centres commerciaux, puis faisaient payer les mêmes magasins pour éviter qu’il n’y ait à l’avenir des violences[5]. Or il semble que ces groupes aient utilisé les manifestations contre les mesures sanitaires pour provoquer délibérément des violences au sein des manifestations afin de s’enrichir. C’est bien sûr une attitude scandaleuse que nous dénonçons, tout en nous demandant comment ces bandes ont pu s’infiltrer aussi facilement dans les manifestations. Nous rappelons que le lumpenproletariat, c’est-à-dire le prolétariat déclassé, n’est pas l’ami des mouvements sociaux et des communistes, mais souvent un allié de la réaction pour réprimer les revendications du peuple, ou qui participe ici à décrédibiliser le mouvement social.

Toutefois, l’intrusion au sein du mouvement social de casseurs ne signifie pas qu’ils soient l’unique raison des violences et de la contestation. En effet, comment oublier que la Guadeloupe est un département sous-développé pour un certain nombre de services publics, que le chômage y est élevé et que sa jeunesse part très souvent en métropole sans nécessairement revenir ? Au sujet du refus, qui tend certes à diminuer, de la vaccination par les guadeloupéens, nous ne pouvons que rappeler que nous devons être pour la vaccination (y compris ceux des entreprises comme Pfizer) mais qu’il ne faudrait pas 1) refuser politiquement certains vaccins, notamment reconnus par l’OMS comme les vaccins chinois 2) mettre en place un pass vaccinal qui divise le peuple arbitrairement et instaure une obligation vaccinale déguisée. Le problème de la vaccination obligatoire est qu’il fait écho à un autre scandale : celle de l’empoisonnement au chlordécone[6]. Pendant des années la France a laissé délibérément libre cours à l’utilisation du chlordécone sur les terres des Antilles, alors que le produit avait été interdit pour sa toxicité en métropole. Aujourd’hui, cet empoisonnement aurait causé la mort et des maladies graves sur une grande partie de la population, qui n’a pas été indemnisée par l’État. Comment les guadeloupéens peuvent-ils faire confiance à un gouvernement français qui les traite comme des sous-citoyens ?

Bien entendu, le PRCF et les JRCF sont au côté du combat des travailleurs et de la jeunesse de Guadeloupe et nous espérons la victoire de leurs revendications sociales. Nous en profitons pour saluer par ailleurs nos camarades du Parti communiste de Guadeloupe, dont vous trouverez dans le lien ci-dessous les vœux pour 2022.

Ambroise-JRCF

[1]https://www.ouest-france.fr/region-guadeloupe/en-guadeloupe-retour-de-la-violence-apres-l-appel-a-la-greve-generale-50a9cfde-7abc-11ec-9c59-cf797ef5ccae

[2]http://jrcf.over-blog.org/2021/11/communique-des-jrcf-sur-la-situation-en-guadeloupe.html

[3] Le ministre de l’Outre-Mer avait déclaré être ouvert pour une discussion sur l’autonomie de la Guadeloupe, alors qu’elle ne faisait pas partie des revendications du mouvement social.

[4]https://la1ere.francetvinfo.fr/guadeloupe/les-organisations-syndicales-quittent-le-terrain-social-pour-donner-au-conflit-une-configuration-politique-1205950.html

[5]https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/pass-sanitaire/on-est-sur-de-la-trahison-ce-que-l-on-sait-de-la-mise-en-examen-d-un-policier-soupconne-d-avoir-organise-les-violences-en-guadeloupe-avec-des-gangs_4926059.html

[6]https://basta.media/Quand-la-France-et-des-fabricants

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