Il nous faut l’avouer, à la JRCF, nous n’avons pas tous boycotté la Coupe du monde 2022. Si les raisons du boycott de camarades et citoyens, parfois plus âgés comme notre camarade Bernard (https://www.initiative-communiste.fr/articles/billet-rouge-2/bien-quil-men-coute-je-ne-regarderai-pas-la-coupe-du-monde-de-foot-a-la-tele-coupedumonde2022/), épris de justices et de progrès sont toutes respectables et légitimes – d’autant plus qu’ils ont, contrairement à nous, connu un ballon rond moins gangrené par l’argent et la corruption – nous n’avons pas pu nous y résoudre, tant cette Coupe du monde promettait en termes sportifs, voire politiques. S’il y a un jour où nous n’avons pas regretté ce choix, c’est bien ce samedi 10 décembre où les Bleus ont vaincu dans un match d’anthologie une équipe anglaise menée par un Harry Kane précis et remonté comme le Big Ben et où le Maroc, triomphant de l’équipe portugaise largement favorite, a accédé pour la première fois de son histoire à la demi-finale de la Coupe du Monde. Deux matchs magnifiques, marqués par des arrêts sensationnels de Lloris et Bounou, remplis de tension et où, après avoir dominé la première mi-temps, Français et Marocains ont su tenir bon et résister aux attaques de leurs adversaires. Du beau football, comme on l’aime !

Si le peuple marocain est naturellement extatique devant cette victoire sans précédent, la liesse ne s’est pas bornée aux frontières du royaume d’M6 ou même du Maghreb : de Tombouctou à Yaoundé, de Kinshasa à Dakar, c’est toute l’Afrique qui a exulté devant le plafond de verre brisé, démoli d’une tête par En-Nesyri. 3 fois en quart (avec les monuments du football africain que sont le Cameroun, le Sénégal et le Ghana), le continent africain est enfin représenté en demi-finale d’une Coupe du monde de football. Les Lions de l’Atlas semblaient taillés pour l’exploit ; ils sont pionniers à bien des titres : le Maroc est à la fois la première équipe africaine à passer le 1^er tour d’une Coupe du monde en 1986 et le seul pays hôte du Championnat d’Afrique des Nations à l’avoir remportée à domicile en 2018. Fondamentalement, le Maroc est un pays de football : il suffit de considérer le nombre de joueurs internationaux marocains, le nombre élevé de licences délivrées chaque année et la ferveur qui règne dans les rues des villes et villages marocains les jours de match du WAC de Casa ou du MAS de Fès.

La victoire du Maroc a aussi mis du baume au cœur de ses futurs adversaires. Sur la Canebière,  les Champs Élysées, dans les bars et chez eux, les Français soutenaient majoritairement l’outsider. L’enthousiasme communicatif de la sélection marocaine avait tout pour séduire face à une Seleçao se reposant un peu trop sur ses acquis. Loin des fantasmes des racistes, qui trépignent de rage devant le magnifique palmarès du Maroc et la joie de ses supporters, cette équipe est loin de n’être soutenue que par la diaspora marocaine (ou même maghrébine) et les célébrations qui ont suivi la victoire se sont faites dans le calme et la bonne humeur pour l’énorme majorité des cas. Il est absolument logique et normal, par ailleurs, que les Français d’origine marocaine gardent une affection pour l’équipe de leur pays d’origine ; jamais dans l’histoire n’a-t-on tenu grief aux Français d’origine italienne, espagnole ou portugaise de soutenir l’équipe du pays de leurs parents, seuls les Marocains, les Tunisiens et surtout les Algériens sont perpétuellement sommés de choisir par les racistes hypocrites. Ces petits pisses-froid sont obligés de trouver toutes sortes de prétextes pour dénigrer les supporters du Maroc ; en réalité, ils ne supportent pas qu’une ancienne colonie (et actuelle néo-colonie) qu’ils considèrent peuplée de sous-hommes puisse se mesurer à l’ancienne puissance coloniale. Cette demi-finale est donc aussi à savourer dans tous les Etats libérés de l’exploitation coloniale, qui pour la plupart désormais sont en voie accélérée de développement, qui à rebours de l’hégémonie euro-atlantique et du dollars US en mal de « supporters » n’auront de cesse de prendre leur place dans le paysage sportif mondial. Enfin elle offre un démenti résolu aux chauvins sûrs d’eux-mêmes et de leur supériorité intrinsèque. Sur le terrain de football, comme ailleurs, leur idéologie est mise à mal.

C’est donc avec un petit pincement au cœur que nous espérons le triomphe des Bleus mercredi ! Nous aurions préféré affronter le Maroc en finale.

Mais quoi qu’il advienne, le Maroc pourra se targuer d’un prodigieux parcours !